Les idéaux sont pacifiques ; l’histoire est violente.

Des films de guerre il en existe des tas. Des films de guerre qui prennent aux tripes et qui font ressentir l’horreur des carnages comme si on y était, il y en a déjà moins.

« Fury » fait partie de ses rares œuvres que l’on apprécie malgré le mal être ressenti lorsqu’on les visionne pour la première fois.

Le film de David Ayer fera date, se doit faire date même, car peu d’œuvres cinématographiques semblent si réelles. Les hommes crasseux, détruits par les horreurs quotidiennes sont au cœur de l’intrigue. Car plus que les morts nazies, ce sont les états d’âme de ces étrangers, ici américains -même si n’importe quel pays aurait pu être à l’honneur-, qui prévalent.

WarDaddy tient d’une poigne de fer son équipe. Il est leur père, le tank Fury est leur foyer. Si le commandant s’écroule, plus aucun courage ne pourra émaner de La Bible, Gordo, Coon-Ass et Machine. Machine, c’est Norman, le petit nouveau fraichement débarqué. Il a été formé pour taper des mots sur un clavier plus vite que n’importe qui mais se retrouve pourtant sur le front directement confronté aux carnages. Sans pour autant égaler le monstrueux charisme de Brad Pitt en WarDaddy, ce personnage dégage beaucoup. Son cheminement psychologique est finement tracé. Si Logan Lerman avait déjà fait ses preuves dans « Le monde de Charlie », il prouve ici aux plus réticents l’immensité de son talent. Son regard pur étonne dans les premières scènes, ses pleurs face à la mort émeuvent, jusqu’à ce que la folie de la guerre s’empare de lui. Yeux pochés, rougis par les larmes, sourires fuyants... Le voilà brisé par la guerre comme ses camarades.

C’est cela qui fait que « Fury » pose un étau autour de notre cœur : ses personnages divinement joués. Les regards pleins de non-dits du commandant Don Collier ne font que souligner encore une fois l’immense justesse du grand Brad Pitt, apte à se glisser dans la peau de n’importe quel personnage. Mais donnez-lui un Oscar bon sang !! La grande surprise de ce casting a été la présence de Shia LaBeouf. Que l’on apprécie ou pas l’homme, force est de constater que sa préparation intensive pour le rôle de La Bible (il aurait apparemment trouvé la foi et ne se serait pas douché durant toute la durée du tournage) a porté ses fruits. Son regard est incroyable. Tant de sentiments complexes sont visibles dans ses yeux, tant de détresse et de haine à la fois ! Impossible de passer à côté de cette performance, qui est pour moi la révélation de « Fury ». Car hormis Pitt, Lerman et LaBeouf, le reste du casting est correct mais sans plus.

David Ayer sait diriger ses hommes, et n’a aucun reproche à encaisser concernant sa mise en scène de qualité. Ses plans de caméras sont fluides et permettent de maintenir la tension. Des plans répétitifs trouvent tout leur intérêt lors des scènes de bataille (Boyd et son "envoyé ! " reviennent une petite dizaine de fois), et permettent de mettre l’accent sur la maîtrise et le savoir-faire des soldats. La grandiose scène finale, tout comme le face-à-face entre les deux chars ennemis sont des moments oppressants où on ne peut s’empêcher de retenir son souffle. Il faut dire que les compositions de Steven Price y contribuent beaucoup.

Je n’ai finalement qu’un reproche à faire à ce grand film, ou plutôt qu’une interrogation à reste : est-ce normal que les tirs des chars ressemblent à des tirs de pistolets lasers ?
mewnaru

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