Le Ritchie-Tarantino du pauvre
Alors moi j'avais assez envie de voir ce film; j'aime bien le très lisse Ryan Gosling, j'adore l'extrêmement graveleux Sean Penn, et l'espèce de biche dont ils se sont retrouvés flanqués (Emma Stone) n'est pas dégueulasse.
Hélas, après une ouverture réussie, assez dure, qui plante le décor de façon succincte et brutale, on se retrouve embarqué dans 1h30 de clichés tous plus énormissimes les uns que les autres où des gentils en chemise blanche vont s'employer à dérouiller des méchants très méchants en chemise noire (oeil de verre et balafres diverses en option). Tout est ultra prévisible du début à la fin: on sait tout de suite qui va tuer qui, quand et pourquoi.
On regrettera également que le réalisateur n'aille jamais au fond de ses idées, à commencer par les personnages: Sean Penn incarne le mafieux dément à merveille, mais est complètement desservi par une mise en scène souvent grotesque. Le héros (Josh Brolin) ténébreux, vaguement torturé par son passif de soldat, ne pétera pas une seule fois les plombs. Ryan Gosling évoque sa crainte de basculer du côté obscur de la force, au milieu de la violente guérilla qu'ils mènent à la pègre, mais ce bref instant de doute ne durera pas plus de 5 minutes (et d'ailleurs, les héros ne se salissent que très peu les mains, au final). En fait, chacun des personnages possède une identité propre, mais aucun n'a de profondeur. C'est vraiment décevant, car pourtant il y avait matière, même si ce sont des personnages très stéréotypés: le flic black, le pistolero et son acolyte affublé de son sourire d'attardé, le "geek" en charge des écoutes, le flic alcoolique repenti, le meneur tête brûlée, ...
Graphiquement parlant, l'action se déroule dans une L.A. des années 50 assez joliment reproduite, mais à aucun moment on ne s'émerveille sur les images (directeur de photographie, m'entends-tu ?) Les scènes d'action (particulièrement les fusillades) sont bordéliques au possible, en particulier la dernière où on se croirait dans un FPS cheap réalisé par un studio minable des pays de l'est: les ennemis (attardés, car ce sont les méchants) arrivent un par un dans le feu nourri des héros, pourtant dans des positions stratégiquement très discutables. Le tout se termine par un échange de tir ridicule autour d'un sapin de Noël où l'on pourra admirer, en slow motion s'il vous plaît, des boules et des guirlandes voler en éclats dans tous les sens. Waouw.
Bref. Je mets 5, car je n'ai pas passé un mauvais moment au cinéma, mais j'en attendais sincèrement beaucoup plus. Je serais curieux de lire le bouquin de Paul Lieberman (Tales from the Gangster Squad), dans l'espoir qu'il pâlie un peu aux divers manques du film.