De par un cinéma totalement libéré des contraintes des bonnes mœurs contemporaines, et ce retour à un certain obscurantisme idéologique, Claude Sautet est l’un des plus grands illustrateurs des rapports humains dans toute leur singularité. Les potes qui s’engueulent et finissent par se taper dans le dos autour d’un verre, la liberté de fumer sa clope au restaurant, de conduire sa R5 sans mettre sa ceinture de sécurité, après tout on est libre de sa propre sécurité non ?..., faire la cour à une femme sans être taxé d’ignoble misogyne…


Et c’est en passant par un personnage des plus singuliers, magnifiquement interprété par un Yves Montant magnétique, que Sautet fait véhiculer ces petits riens aujourd’hui considérés comme des tares par une certaine supra-classe qui ne représente qu’elle-même.


Voilà c’était ma petite pensée toute personnelle du jour, elle vaudra ce qu’elle vaudra.


Garçon ! Un titre qui donne envie de commander un bon plat en sirotant un bon verre de vin autour d’une table avec une bande de copains, illustre parfaitement la simplicité des rapports humains, faits de partie de cartes entre amis et de joie de vivre.


En fin limier et en metteur en scène classieux, Sautet n’obnubile jamais les petits et gros tracas de l’existence, la perte d’un ami, les rêves qui prennent vie, parfois s’effondrent, mais aussi les désillusions. Dans le rôle titre de ce serveur de brasserie, grand escogriffe qui traverse la vie des gens en bon samaritain, toujours près à aider par des petits gestes, malin parfois..., représente la quintessence de la bonhomie, Montant illustre parfaitement le quinquagénaire moyen que l’on a pas encore placardé comme looser. Les seconds rôles occupent toujours une place prépondérante dans le cinéma de Sautet, Villeret est encore une fois grandiose et donne beaucoup de regrets sur cette époque bénie où les seconds rôles dans le cinéma français étaient des Jacques Villeret…


La peinture de cette France citadine est magnifiquement mise en image par cet excellent illustrateur qui n’omet jamais de bonifier sa réalisation par un esthétisme de tout premier choix et un méthodisme à toute épreuve. On retrouve son goût de l’ellipse discrète, les jeux de miroir, le travail sur la lumière, une manière de filmer les visages. Tout ce qui fait l’essence de ce cinéma intemporel pourtant bien ancré dans son temps.


Aucun autre réalisateur hexagonal n’a réussi mieux que lui à capter les petites intentions, la simplicité, les amourettes et la camaraderie.


Et les conclusions de ces films ont quelque chose de Fellinien… tout explose dans la douce catastrophe et la bonne humeur. Un grand enfant ce Claude Sautet.

philippequevillart
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le 8 nov. 2018

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