Baz Luhrmann et le syndrome de Lima.
Petite définition : le syndrome de Lima désigne le fait qu’un « un ravisseur éprouve de l'empathie, ou même une relation fraternelle avec son (ses) otage(s) ».
Après le visionnage de Gatsby Le Magnifique de Baz Luhrmann il me parait d’une évidence lumineuse que ce dernier souffre du dit syndrome, preuves à l’appui !
Pendant 30 min le réalisateur australien torture, massacre, viol l’œuvre de Francis Scott Fitzgerald : une bande son anachronique (sa marque de fabrique parait-il…) qui dénature l’œuvre originelle témoin de l’essor de la musique jazz dans les fêtes de l’époque, un montage « clipesque » à la sauce MTV qui donne le tournis et nausée, et enfin une overdose de numérique pour finir son œuvre de destruction de tout l’atmosphère qui faisait l'une des (nombreuses) forces du roman.
Mais petit à petit l’infâme tortionnaire se prend d’amour pour sa victime. Il commence à se dire que mine de rien Gatsby n’est pas un des livres majeurs de la littérature américaine pour rien, le personnage de Gatsby a quand même du potentiel, la belle gueule la plus riche de New York, épris d’une jeune et belle demoiselle bien née, est prêt à tout pour retrouver son amour perdu. Une belle romance à faire pleurer les plus sensibles de ses spectateurs.
Il installe donc un rythme plus lent, une bande son plus discrète et plus adaptée, de beaux moments en ressortent (la scène du thé ou la mort de Gatsby) et le film regagne en intérêt. Et beau prince il donne le rôle-titre à un des meilleurs acteurs de sa génération, au charisme de feu et qui sera éblouissant de classe, Leonardo Di Caprio.
Malheureusement le geôlier est un sadique avant tout, la profondeur du roman ne l’intéresse guère, lui veut en mettre pleins les yeux aux spectateurs, quitte à survoler nombre d’aspect du roman :
-Jordan Baker quasi absente du film, elle a quand même une liaison avec le narrateur !
-le narrateur encore plus pot de fleur que dans le livre (facile alors de taper sur Tobey Maguire mais Luhrmann ne fait vraiment rien pour le mettre en valeur).
-aucun recul sur la personnalité des personnages (pour lui Gatsby = gentil et Thomas "Tom" Buchanan = méchant).
-l’importance du contexte historique (prohibition, classe supérieur totalement déconnecté des réalités) est évoquée à la vitesse de la lumière.
-et j’en passe !
Drôle de film que cette torture artistique a donc donné.
Le précédent film avec Robert Reford, qui avait au moins le mérite de respecter le livre, quitte à fleureter avec le copier-coller, était de bien meilleur qualité.