Gendarmes et Voleurs par Alligator
Encore un joli coup de Monicelli. Je craignais - foutus a priori qui cachent mal mon inculture à son égard - que la présence de Steno ne garantisse un délicat affaiblissement. Je m'attendais à quelques grossières scènes de farce ou que de vulgaires gesticulations viennent empeser cette comédie.
Du casting, je ne connaissais évidemment que Toto - je ne trouve pas l'accent grave sur le o, scusi.
Alors la prestation d'Aldo Fabrizi, lequel par ailleurs participe à l'écriture des dialogues, est pour tout dire une magnifique surprise. Le monsieur joue juste. Il apporte à son personnage de gendarme bedonnant un naturel et ai-je envie de dire une grâce étonnante malgré un surpoids évident. C'est plus dans sa face, son regard et ses mimiques bonhommes qu'il travaille avec un incroyable talent à donner à son personnage une humanité toute monicellienne. Je fais ici preuve d'un simplisme que mon jeune âge n'autorise que difficelement, je l'admets.
Je suis d'ailleurs encore sidéré que d'une telle multitude de scénaristes il puisse émaner une histoire aussi simple et fluide, une unité personnelle aussi caressante à l'âme.
Il faudrait en outre peut-être saluer plus encore le travail des dialoguistes sur ce film, car ils font sans aucun doute le lien majeur entre les personnages, leur donnent cette truculence en même temps que cette vitalité face à la pénibilité de la vie quotidienne de la jeune Italie d'après guerre. Entre faim qui tenaille et bourbier banlieusard, les personnages continuent de sourire, de se chamailler gentillement et de poser un regard plus que bienveillant sur leur prochain. Là où d'autres produiraient les pires tragédies - je dis cela sans péjoration, certains le firent très bien - l'équipe Steno et Tellini pour le scénario, Monicelli, Fabrizi, Brancati, Flaiano, Maccari pour les dialogues assure un spectacle divertissant et intelligent à la fois, entre émotions amères et rires francs, résolumment positifs et optimistes.