Dans ce remake sophistiqué du thriller britannique la Loi du milieu de Mike Hodges en 1971, Stallone reprend le rôle de Michael Caine qui a accepté avec joie un rôle secondaire et l'idée de se frotter à Stallone (qu'il retrouvait 20 ans après A nous la victoire), qui livre ici une de ses meilleures prestations avec ce rôle de gangster froid, solitaire et désabusé, contrôlant sa colère, et qui se voit offrir une chance de rédemption. Cette nouvelle approche est très bénéfique pour le film, car Jack Carter n'est plus le tueur primitif et brutal de la version originale, c'est un homme torturé sous des allures de colosse, au contraire de celui joué par Caine qui était un vrai fauve rongé par la hargne.
Je ne sais pas si tout ceci a été perçu par les critiques et le public, car j'ai vu à droite à gauche de mauvaises critiques qui taxent Stallone de mauvais acteur, le film étant sans action, mou et ennuyeux... Mais attention, c'est pas un polar d'action justement, c'est un film beaucoup plus intériorisé et calme par rapport à la sauvagerie de la Loi du milieu ; certes, il y a comme une impression de film ronronnant par moments, c'est moins percutant que son modèle, mais le réalisateur donne une atmosphère sombre au climat poisseux et triste en traitant l'image crade et terne pour marquer la rupture du personnage de Carter venant de Vegas, ville colorée, avec le côté pluvieux et morne de Seattle où a lieu l'action. Les scènes d'action ne sont pas ce qu'on recherche dans ce type de polar non plus, il y en a mais elles sont plus brèves et fulgurantes, ça n'en est que plus trouble. Quant à Sly, il peut justement être très bon quand il se force un peu à ne pas jouer que les gros bras, quand il sort de ses rôles habituels. Face à lui, le reste du casting est impeccable, notamment Mickey Rourke bien utilisé avec son visage ravagé qui en devient étrange et inquiétant à chacune de ses apparitions. Au final, en dépit d'une intrigue banale et conventionnelle, le réalisateur s'en sort pas si mal, abusant quand même de quelques effets de mise en scène pénibles, mais même si le film reste inférieur à la Loi du milieu, il a de nombreux attraits.