C'est dans un futur assez proche où tout est informatisé, même les humains, que Mamoru Oshii nous emmène en adaptant le manga Ghost in the Shell. Il nous fait suivre la traque d'un dangereux pirate informatique par deux cyborgs à l'apparence humaine appartenant à une unité du gouvernement.
C'est dans un univers glaçant qu'il exploite à merveille qu'Oshii nous immerge, un monde où l'informatique à une place prédominante et où des créations artificielles ont peu à peu remplacé les humains, des entités capables de se reproduire (donnant lieu à des scènes métaphoriques qui ont (énormément) inspiré Matrix, comme cet univers dans son ensemble d'ailleurs). Le cadre de l'histoire est assez complexe mais Oshii ne nous y perd jamais, axant notamment son récit sur Motoko, un cyborg à l'apparence féminine se posant des questions et traquant un terroriste informatique pour le compte du gouvernement, avec l'aide d'un de ses coéquipiers, lui aussi étant une entité informatique.
La force de Ghost in the Shell se trouve dans ses plusieurs niveaux de lectures, tous clairs, pertinents et traités efficacement, Oshii mêle l'intrigue policière à un univers intelligent, intrigant, fascinant et propice à de multiples réflexions. L'intrigue est efficace, assez mystérieuse et c'est avec une certaine fascination que l'on suit ce personnage féminin aux yeux aussi perçants qu'inoubliables. Mais derrière cette intrigue se cache tout un passionnant fond politique mais surtout des questionnements sur l'avenir de l'homme et son rapport à l'informatique. Oshii met en place un monde où l'homme et son processus de reproduction ne sont plus indispensables et où la technologie et l'informatique ont dépassé l'homme, sachant penser et ressentir comme un humain. Là où le film prend une tout autre dimension, c'est dans la psychologie du personnage de Motoko, entité qui ressent pourtant des sentiments et qui s'interroge sur ce qu'elle est à l'image de la scène où elle se baigne dans l'océan. Oshii donne de la puissance à ces scènes où ses doutes, sa solitude et ses angoisses ressortent.
Puis quelle mise en scène ! En peu de temps il pose les bases de cet univers et donne de la consistance et de la richesse aux personnages, mais surtout met en place une tension, intensité et puissance (dramatique, intellectuelle...) hallucinante à son récit. L'animation est fluide et remarquable, retranscrivant à merveille toute la froideur, l'angoisse, la noirceur mais aussi l'érotisme de cet univers où tout semble désespéré. Le montage est assez audacieux sans devenir lourd ou lassant, bien au contraire et Oshii arrive vraiment à mettre en place un sentiment de fascination pour les personnages et enjeux, bien aidée par cette animation et le travail fait sur la bande-originale.
Un animé aussi puissant et marquant qui interroge sur l'avenir et le rapport de l'homme avec la technologie en mettant en avant un univers froid, glauque et surtout fascinant ainsi qu'un cyborg pouvant penser et ressentir tel un humain... Quelle claque.