Après le train fantôme, le bus fantôme
Talentueux artiste martial, Wilson Tong a montré beaucoup moins de virtuosité quand il est passé à la réalisation. Tout au plus a-t-il signé une poignée de séries B divertissantes comme Snake Deadly Act, All-Mighty Gambler ou Dangerous Duty. Mais le reste de sa filmographie consiste essentiellement en des œuvres médiocres. C'est particulièrement vrai de son registre de prédilection : Les films de fantômes. Auteur de près d'une dizaine de ces longs métrages fantastiques, Wilson Tong s'y distingue seulement par la pauvreté de ces œuvres. A sa décharge, il faut reconnaître que horreur fantastique et cinéma HK n'ont jamais fait bon ménage. Ce n'est en tout cas pas ce Ghostly Bus qui va nous convaincre du contraire.
L'appellation de film fantastique n'est d'ailleurs pas tout à fait adéquat. Car, comme bon nombre de films en provenance de HK, Ghostly Bus pratique le mélange des genres, meilleur moyen pour réunir un maximum de public et donc faire un maximum d'argent.
Ghostly Bus est donc essentiellement une histoire d'amour, celle qui unit Michael et Ling Ling. Le développement de cette romance est l'axe central du film et Wilson Tong y concentre une bonne partie de son métrage. Hélas, malgré sa volonté évidente de soigner son travail, Tong ne parvient jamais à rendre l'ensemble très prenant. Les raisons de son échec sont diverses. Le manque d'alchimie entre la toujours jolie Valerie Chow et le toujours fashion victim Simon Yam en est une. Les dialogues pesants et stéréotypés en sont une autre. On devine aisément que le faible budget (synonyme de peu de temps pour préparer le script et encore moins pour le tourner) est responsable d'une bonne partie de ces scories mais le résultat à l'écran est sans pitié.
Probablement inspiré par Rouge (avec lequel on ne le comparera pas, ça serait trop cruel pour le film de Tong), Ghostly Bus fait revenir d'entre les morts Ling Ling et avec elle une flopée d'autres esprits décédés dans le même accident. Or, si l'aspect romance du film n'était pas très convaincant, il avait au moins l'avantage d'être essayé avec cœur, ce qui n'est pas le cas du versant fantôme du film. Tong y rabbache tout ce qui fait la médiocrité des films d'horreur HK. Il serait grand temps qu'on dise aux réalisateurs de l'ex-colonie spécialisés dans le genre qu'un éclairage verdoyant sur un visage en gros plan vaguement maquillé n'est pas suffisant pour faire peur ! Pourtant, l'introduction du film avec de mystérieux fantômes donnant une représentation d'opéra dans le fameux bus du titre laissait augurer d'une meilleure inspiration de la part du réalisateur. La suite ne sera que déception sur déception avec effets de montage prévisibles (la première rencontre entre Hero et Ling Ling), situations pseudo angoissantes très mal amenées (toutes les manifestations surnaturelles au sein du bus) ou attaque fantomatiques ridicules (le conducteur du bus qui fait son Freddy Krueger du pauvre). Décidemment, l'horreur à Hong Kong, ça ne fait pas partie des spécialités locales.
Le reste de Ghostly Bus est occupé par les démêlés que connaît Michael avec les triades. Tong s'y montre en terrain connu et concocte toutes les séquences attendues : torture de l'ami du héros, scène d'action dans un entrepôt et autres gimmick du genre (Michael qui utilise une lame de rasoir cachée dans sa bouche comme arme). L'ensemble est sans génie mais professionnel, à l'image de la prestation de Simon Yam.
Pour aussi moyen que soit Ghostly Bus, le film avait réussi à trouver son public lors de sa sortie en 1995. Il est cependant fort peu probable que beaucoup de personnes chercheront à le voir sur le marché de la vidéo. Il est des Bus qu'il vaut mieux parfois éviter...