Du divulgachage de l'intrigue dans ce billet, soyez prévenu
Déjà en son temps, Dame Agatha Christie profitait de ses romans tournant autour du mystère pour dresser un portrait pas toujours très reluisant de l'humanité, mais en particulier d'une classe sociale qu'elle connaissait d'autant mieux qu'elle en faisait partie: la classe supérieure anglaise allant de la petite bourgeoisie à l'aristocratie.
Dans À couteaux tirés, Rian Johnson s'inscrivait déjà dans cet héritage en tirant à boulets rouges sur la cellule familliale dans son ensemble, mais en particulier sur celle des riches; révélant la mesquinerie, l'hypocrisie, et dans l'ensemble la bassesse aussi bien morale qu'intellectuelle qu'on y rencontre.
Dans Glass Onion, le réalisateur en rajoute une couche, expression particulièrement appropriée en l'occurence, si ce n'est qu'au lieu de s'attaquer à la grande bourgeoisie un peu dans la continuité de Christie, il tire le portrait peu reluisant de la vulgarité très ordinaire des nouveaux riches: magnats des nouvelles technologies, stars et influenceurs en tout genre en prennent pour leur grade.
Le titre est déjà assez explicite en la matière puisqu'il oppose la complexité à laquelle renvoie les multiples pelures d'oignons et la transparence du verre. Derrière l'apparence se voulant complexe qu'ils se donnent, on ne trouve derrière ces personnalités que vacuité, indigence intellectuelle, et pouvoir basé sur le paraître. Ceux qui se font passer pour des génies sont en fait des crétins ne devant leur réussite qu'au vol direct des idées des autres ou à l'exploitation de l'avidité de gens qui ne sont pas moins crétins qu'eux.
La fin, particulièrement symbolique, déclarant en quelque sorte que ce pouvoir dont ces "puissants" s'enorgueillissent n'est qu'un plafond de verre blanc qui pourrait être aussi facilement brisé que les sculptures de verre qui le représente intradiégétiquement, et même de conclure métaphoriquement qu'il faudrait peut-être brûler nos idoles pour nous libérer de leur influence néfaste.
En plus de ce côté très anar-punk-rock de la conclusion, il faut bien sûr souligner la qualité du casting dominé par un Edward Norton dans le rôle d'un Elon Musk de carnaval plus vrai que nature, d'un Dave Bautista réjouissant en youtubeur caricatural, et surtout d'un Daniel Craig impérial qu'on retrouve avec plaisir dans le rôle du génial détective Benoît Blanc. Le reste du casting ne démérite jamais, mais reste un ton en dessous de ces trois là.
L'intrigue du film, tout en jeux de miroir et faux semblants est amusante, même si sans doute moins réussie que le premier opus. Il n'empêche qu'on attend avec impatience le troisième volet des aventures de Blanc par Rian Johnson en se demandant à quelle riche assemblée de crétins il décidera de s'attaquer la prochaine fois.