Un film sympathique, mais un Whodunit lamentable, serait sans doute la façon la plus simple façon de résumer ce Glass Onion.
Et autant crever l'abcès d'entrée de jeu et évoquer à regret la question "woke".
A regret parce que fondamentalement, je devrais et on devrait tous s'en foutre.
A regret parce que ça me fais mal au cul de devoir crier avec les loups.
A regret enfin, parce qu'en soi, l'inclusivité et la mise en lumière de populations relativement invisibilisées, c'est plutôt une très bonne chose.
Sauf que bon, l'enfer est pavé de bonnes intentions.
Un Whodunit, c'est un genre particulier. Un genre dont je suis particulièrement friand (j'ai du lire l'intégralité des Agatha Christie ou peu s'en faut) et où je suis, par voie de conséquence, particulièrement pointilleux.
Et la base du Whodunit, sa substantifique moelle, c'est la question de tenter de deviner qui est le coupable. C'est un jeu d'échec entre l'auteur et le spectateur.
Or dans ce film (true story) j'ai inscrit le nom du coupable sur un bout de papier au bout de environ vingt minutes de film (scène de la plage), que j'ai posé dans un coin avant de le ressortir à la fin devant un public qui aurait sans doute été très impressionné de ce move si toutes et tous n'avaient pas eux même devinés depuis le début qui était le coupable... Quand on connait Rian Johnson et l'industrie Hollywood actuelle, ça ne fait pas plis.
Que cela plaise ou non, ça pose un vrai problème vis à vis du genre cinématographique concerné.
Face à cela, il y a deux solutions possibles :
- Arrêter de vouloir faire du "Politique" et du "signalement de vertu" sur un genre qui n'en a pas forcément besoin. Si on veut mettre en avant les "minorités", il y a des tonnes de films bien plus pertinents et intelligents à réaliser ; un film sur Bass Reeves, premier Marchal noir au US, dont la vie est un roman complètement dingue et dont l'absence de biopic "sérieux" est tout bonnement scandaleuse quand on pense à l'or en barre que constitue son histoire d'un point de vue cinématographique!
Ou bien un film sur Wu Zetian, seule Impératrice de Chine, complètement méconnue et dont la vie gagnerait à être adaptée (avec de bonnes thématiques sur la place de la Femme et le regard qu'on porte sur elle dans une société fortement Patriarcale)...
Et c'est là que deux exemples au pifomètres ; des thèmes pertinents pour traiter de manière Politique et pertinente des minorités, il y en a à foison et pas seulement dans l'Histoire, mais également dans la littérature, la BD etc.
- Faire du Whodunit dans un milieux exclusivement composé de femmes, de minorités et/ou d'homosexuels. Et là il n'y aurait plus de problème et le mystère pourrait valoir la chandelle.
Mais là en l'état, ça ne fonctionne tout simplement pas. A tel point que je ne me sens même pas redevable de balise spoiler, tant il n'y a aucun suspense sur cette question centrale...
Ensuite, pour continuer sur les points qui ne marchent pas, on a le mac guffin de la serviette de table qui n'est pas très crédible au vue des enjeux.
On a le cliché complètement éculé de la personne qui se fait tirer dessus (et qui en plus était la soeur jumelle de la victime : clichéception, mots compte double, ne passez pas par la case départ, camoulox!) mais qui, Ô quelle chance! portait sur elle un livre/un médaillon/un vieux tourne disque (rayez les mentions inutiles) qui arrête la balle.
Toujours niveau crédibilité, la façon dont le crime est commis (allergie à l'Ananas et mort quasi instantanée) est pas mal limite aussi.
Au passage, le clin d'oeil un peu trop appuyé à Ellon Munsk fini par se retourner contre Rian Johnson, puisque le mec riche qui fait son malin en se croyant génial, mais qui en fait n'est qu'un imposteur médiocre, ça pourrait facilement être un auto-portrait quand on regarde attentivement le cinéma de ce dernier (même Looper, plutôt sympa à première vue, n'a aucun sens si on branche son cerveau 2 minutes)...
Et puis bon, l'insistance sur le Covid était pas vraiment utile à mon sens.
Enfin, grosse erreur d'amateur avec la Joconde qui brûle comme si elle était peinte sur de la toile alors que c'est une peinture sur bois.
Cela étant dit, le film reste sympa et n'est pas exempt de qualités ;
Déjà niveau humour, c'est plutôt plaisant. La scène où Benoit Blanc casse tout le délire de Rian Norton-Munsk pendant le diner était absolument fantastique! Un grand moment de cinéma!
Le personnage OSEF qui traine dans le coin et ne sert à rien du début à la fin de l'histoire, c'était bien cocasse et j'ai su apprécier (d'autant plus que c'est bien la seule chose qui m'a surpris durant le visionnage, vu que je m'attendais en effet à ce que ce personnage soit la clé pour démêler un indice, mais non...)
Les acteurs et actrices sont tous bons et convaincants.
Certains passages sont intéressants visuellement parlant. Je pense en particulier à ce moment dans le noir total, seulement balayé par la lumière intermittente du phare...
Il y a aussi ce jeu de "poker menteur" illustré par l'ouverture/fermeture du système de sécurité de la Joconde.
Enfin, la scène défoulatoir et cathartique de la destructions de bibelots bourgeois et pédant était plutôt jouissive (Rian, je peux refaire la même chez toi, en hommage à Star Wars VIII ou bien ? Ah non, y a que toi qui a le droit de tout casser?... ok....)