No glory

    Voici le film à message, que l’on regarde comme on découvre une page d’histoire méconnue, puisque jamais raconté. Des déshérités, des frustrés, des sans-nom, des hommes, qui à peine sortis des chaînes de l’esclavage, font le difficile apprentissage de la liberté. Elle se gagne par un combat de tous les instants pour la dignité, la liberté…. Alors mon papier peut donner l’impression que le film est donneur de leçon, austère, et chiant, même pas. Par contre il est porteur de message. « Souvenez-vous ! »…De ceux qui ont luttés pour faire avancer la cause, des droits de l’homme noir dans l’Amérique blanche, et des droits et devoirs de l’homme blanc, dans une Amérique qui évolue, vers une tout petit, petit, petit peu plus d’égalité minime, mais bon, l’histoire avance, pas à pas, il paraît.

 Le réalisateur a choisit de faire le maître d’école, et fait passer un message par le biais du divertissement. Un casting assez glamour, vendeur. On regarde ça comme un film d’action, qui se déroule en pleine guerre de Sécession. Entre devoir de mémoire, et anecdotes romanesques, qui tombent à point nommé, à peu-près pendant tout le film. Des hommes, dignes tous sans peur et sans reproche, des héros. C’est l’histoire d’une garnison composée uniquement d’hommes de couleurs, mais utilisée comme porte-drapeau, pas destinée à combattre, car les nordistes comme les sudistes, n’ont pas envie de donner des fusils à un noir quel qu’il soit, on ne sait jamais…

  Ceux qui comme moi, on déjà entendu parler de la guerre de Sécession, vont trouver la vision du réalisateur très chiche. Le chef de la garnison, c’est un blanc, (bien sûr), prêt à se sacrifier pour ses hommes, (par conviction ?). L’honneur militaire est sauf. Tous les soldats de la garnison, passent pour des sans grade, naïfs, sans éducation, bêtes, ou endurants, tous au grand cœur, l’image du bon nègre, à la Uncle Tom, ou son cousin Jim Crow, n’est pas loin. Il y a les bons officiers blancs, les méchants officiers…blancs. C’est tellement binaire, noir et blanc, si on veut faire une blague foireuse, on pourrait dire que Zwick doit être protestant pratiquant de souche. Et on est amené par la main, à un sacrifice final, un bain de sang héroïque, qui réunira tout le monde sous le monument historique, cela va de soit, il ne peut en être autrement, n’est-ce pas ? Un soldat, ça meurt, en héros. Noirs et anciens esclaves, tous ensemble, marchons ! Evidemment on ne peut qu’être d’accord avec l’intention, mais le rendu, presque sous vernis…

   Sans les grands idéaux cachés en-dessous, se serait un vulgaire blockbuster, à l’Américaine, donc cher, donc plein la vue. Le sujet est délicat, c’est sûr. Zwick a eut le courage de s’y atteler, c’est vrai, et même s’il n’arrive pas à dépasser le sacré, et sacro-saint devoir de mémoire, cela se regarde avec plaisir. Mais les grosses ficelles du spectacle, évacuent  souvent toute dimension historiciste, même si l’histoire est vraie à la base. Regardons ça, comme un western tardif, sinon on va se faire avoir.
     De nouveaux hommes libres, (anciens esclaves donc), jouées par des récentes stars hollywoodiennes, noires donc, (Washington, Freeman, en tête). Broderick excellent en jeune chef, (blanc, idéaliste, et compréhensif). L’étoffe des héros, version sudiste. Tout est là pour nous faire verser une larme de cinéma, on est comme tenu par la main, tout on ménageant  les susceptibilités. Donc le film est moyen. Par contre Zwick est bon équilibriste. Mais nous. Aura-t’on vraiment comprit après la fin du film, à la sortie du cinéma, pourquoi ses hommes se sont battus,  et ont acceptés de mourir comme des chiens? Pas sûr. Nous, on sait bien qu’ils ne seront pas plus libres à la fin de la guerre, qu’ils ne l’étaient avant. Ils ont exigés le droit d’aller se faire embrocher, en espérant être plus libre après ? C’est n’importe quoi ! Alors pourquoi ?

    Pourquoi ces hommes, qui n’étaient pas des héros, même si Zwick s’évertue à nous les montrer comme tel, (quelques actes de bravoure sans suite par çi, une camaraderie fraternelle, par là), très photogénique, tout ça, des petits soldats de plomb, qui seront formés d’une main virile, pour aller servir  la nation, qui ne leur donne même pas le droit d’avoir des noms. La leçon est claire. Tous ces hommes étaient des héros. Comme Denzel est un héros, ou Morgan Freeman, ou qui d’autre ?…Zwick nous fait un monument historique. Pour beaucoup, se sera bien, ça peut se comprendre, je le leur laisse. Pour moi c’est peu, il n’arrive pas à dépasser le spectacle pittoresque, haut en uniformes, et très compatissant. Tous ces hommes sans nom, ces « héros »  sans visage, méritent plus que le simple costume post-historique du premier régiment noir, à qui on donne enfin des fusils, et qui est tombé valeureusement pour le drapeau.