Plus que repéré avec Winter Brothers et Un jour si blanc, Hlynur Pálmason est passé à la vitesse très supérieure avec Godland dont il est légitime de se demander pourquoi il ne faisait partie que de la sélection d'Un certain Regard, à Cannes. Godland, qui rappelle parfois par son thème Silence de Shinoda, puis de Scorsese, peut aussi s'envisager comme un croisement audacieux et brillant du cinéma de John Ford avec celui de Cart Dreyer. Une sorte de western, oui, mais situé dans la splendeur et la désolation des terres islandaises et magnifié par un format carré aux coins arrondis qui n'est pas qu'une lubie stylistique du réalisateur. La mise en scène est somptueuse, admirez ces panoramiques soyeux et ces plans larges qui ramènent l'homme à sa condition ridicule, dans l'immensité minérale de la nature, lui qui n'arrive qu'à dompter les chevaux, et encore. C'est très beau et d'une riche austérité, si l'on ose employer cet oxymore. La religion, l'arrogance danoise (l'histoire se déroule au XIXe siècle, avant que l'Islande acquiert son indépendance), notamment, se coulent naturellement dans les thèmes qui courent tout le long de ce film éblouissant qui n'oublie pas de composer un personnage central passionnant, un prêtre partagé entre le spirituel et le charnel, et dominé par les éléments et les habitants de cette île fascinante et périlleuse pour qui n'a pas appris à la connaître et à la redouter depuis sa naissance. Et pour qui ignore également que le silence des chevaux est un leurre.