J'ai découvert ce film par hasard, et je ne m'attendais pas à un tel choc. Visuel tout d'abord. L'image est superbe et sa composition est surprenante et magnifique. Les plans toujours serrés laissent peu de place aux décors. On ne voit d'un bateau qu'un bout de pont, quelques couchettes d'une cale obscure. Ce sont les humains, corps souvent entassés ou enchevêtrés qui emplissent le cadre, et de ces groupes compacts se détachent les principaux personnages. Gros plans sur des regards étonnés, tristes ou tendres, peu de mots sortent de leurs bouches et pourtant tant de sentiments et d'émotions jaillissent à l'écran. Car l'émotion est le coeur du sujet, celle éprouvée par cette multitude de migrants naïfs emplis de rêves et d'espoirs fous. Et non seulement le réalisateur arrive à nous faire partager ces émotions, mais il arrive aussi à nous faire découvrir comment ces candidats au bonheur étaient traités à la descente du navire. Intéressant, magnifiquement interprété, ce beau tableau ne serait pas complet si la bande son n'avait pas été à la hauteur. Et surprise là aussi. Le navire gronde comme un monstre inquiétant, les paysans martèlent leurs tambours dans des rythmes envoûtants, et d'admirables chansons de Nina Simone accompagnent les premiers pas des migrants du début du siècle sur le sol américain. Magique !