Réalisé par Frédéric Tellier et sorti en 2021, Goliath est un film politique et engagé basé sur des faits réels. C'est le troisième brulot au cinéma du réalisateur dont il s'est fait la spécialité, après L'Affaire SK1 (2015) et Sauver ou périr (2018), et avant L'Abbé Pierre - Une vie de combats (2022). Avant de voir Goliath, je n'avais vu que Sauver ou périr du même réalisateur et les deux films ont beaucoup de choses en communs, en plus de la présence de Pierre Niney devant la caméra. On sent son appétence pour le drame, pour les faits réels et pour une représentation la plus réaliste possible des rapports humains. Goliath est donc basé sur des faits réels, ou plutôt librement inspiré des faits réels, ici l'affaire dite des "Monsanto Papers" impliquant l'agro-industriel Monsanto et son herbicide à base de glyphosate.
Nous sommes en période post Covid et une enquête est menée sur un scandale d'État, potentiellement caché par les hautes instances du pouvoir en place, autour des OGM et d'un pesticide nommé la Tétrazine. Des personnes sont tombées malades et d'autres sont mortes à cause de l'utilisation déraisonnée de ce pesticide qui est défendu par des lobbyistes comme Mathias Rozen (Pierre Niney). Et en face, pour défendre les malades, nous avons l'avocat Patrick Fameau (Gilles Lellouche). On va suivre cette lutte acharnée qui semble perdue d'avance, d'où le titre du film Goliath.
Goliath est un film extrêmement prenant et dur sur le plan émotionnel. Si vous recherchiez un feel-good movie, passez votre chemin. En s'inspirant de faits réels, Frédéric Tellier veut nous faire prendre conscience d'une terrible réalité, à savoir l'influence néfaste des lobbystes sur les décisions prises par les pouvoirs politiques et donc sur notre santé. On peut même parler de corruption, à ce niveau là d'influence. Il remet également en avant la crise du covid qui a étouffé certaines affaires et qui a mis un voile sur beaucoup de choses. C'est un docufiction très réaliste qui veut faire passer comme idée que derrière ce combat contre la maladie, il y a la vie et il y a de l'espoir.
Côté casting, Gilles Lelouche et Pierre Niney sont juste excellents. Gilles Lelouche est physiquement complètement investi et impliqué dans son rôle. On le voit avachi et décoiffé, on sent son mal-être intérieur. C'est un avocat "à la dérive", tourmenté et dévoué corps et âme la cause qu'il défend. C'est certainement le meilleur rôle et la meilleure prestation que j'ai vu de lui. Quant à Pierre Niney, il est délicieusement antipathique. Son charisme, son éloquence et sa force de conviction sont tels, qu’on tombe immédiatement sous son charme. C’est voulu bien sûr et c'est ça qui est le plus effrayant. Une scène emblématique de son état d'esprit, c'est lorsqu'il "achète" l'affection de sa belle-fille (il est en couple avec une femme qui a une fille) en lui offrant à elle et à toutes ses copines une place de concert d'Ariana Grande et il loue une limousine pour les y emmener. C'est un pur cynique et il pense qu'il peut tout acheter, même l'affection de sa belle-fille.
A mon grand regret, le film va parfois un peu trop loin dans le larmoyant. Frédéric Tellier rajoute beaucoup de pathos, de la dramaturgie dans l'excès et le film n'avait vraiment pas besoin de ça ...
Prenons pour exemple les deux agricultrices qui sont en couple et dont l'une est tombée malade. C'est déchirant, on voit la violence et le désespoir de l'agricultrice qui a perdue sa compagne. C'était suffisant selon moi, mais non ce n'est pas suffisant pour le réalisateur Frédéric Tellier. Il fait le choix pour le personnage de s'immoler par le feu devant l'entreprise qu'elle tient comme responsable de la mort de sa compagne.
Goliath est un film docufiction qui éveille les consciences et c'est en cela qu'il est nécessaire de le voir. C'est aussi un thriller très efficace avec deux acteurs têtes d'affiche qui sont au meilleur de leur forme. Je regrette juste le choix du réalisateur d'un peu trop dramatiser et romancer une histoire dans un docufiction qui est sensé être réaliste. Certains choix dramatiques m'ont fait sortir du film, c'était too much et ça voulait trop enfoncer le clou. Frédéric Tellier joue un peu trop avec le mélodrame, mais le film reste de très bonne facture, un peu trop plombant, mais néanmoins prenant.