Un premier film consciencieux
Pour sa première réalisation, Ben Affleck fait le choix judicieux d'adapter un roman de Dennis Lehane, l'auteur des excellents "mystic river" et "shutter island". Judicieux car les romans de Lehane s'adaptent très bien - il ne prenait donc guère de risque - et parce que cette histoire est poignante et intelligemment écrite.
Son film est sobre, sans fausse note, sans génie non plus, mais tout à fait honnête pour un baptême. La ville de Boston, très présente dans les romans de Lehane, garde une place centrale dans le film : les nombreux plans de ses quartiers populaires, voire pauvres, les portraits réalistes de ses habitants plus ou moins glauques, abimés par les drogues ou l'alcool, la rendent plutôt attachante. Les acteurs, sans livrer le rôle de leur vie, s'en sortent assez bien ; surtout Affleck Junior, dont le contraste entre son look de gringalet, sa voie d'ado en mue, et sa capacité à tenir tête aux pires crapules, donne une consistance inattendue à son personnage.
Que dire, enfin, et surtout, du scénario proposé par Lehane ? Cette enquête sur la disparition d'une petite fille est assez poignante, et si elle ne prend pas aux tripes autant qu'on pourrait l'espérer, elle a néanmoins le mérite de poser les bonnes questions sur le très délicat sujet de la protection de l'enfance, et la sagesse de ne surtout pas proposer de réponse toute faite. Son dénouement pertinent et réfléchi, qui illustre toute la perplexité et l'incertitude de Kenzie quant aux choix qu'il a faits, est sans doute sa plus belle qualité.
Un film qui mérite incontestablement d'être vu, donc, autant pour les débuts intéressants d'Affleck derrière la caméra (que le récent "Argo" confirmera), que pour l'intelligence de son scénario.