L'histoire est intéressante, les rebondissements possibles sont bien exploités, les acteurs sont bons, et surtout, surtout, le sujet est excellent. Quel autre film traite bien ces oubliés de l'histoire, les Ossis, ces ex-habitants de la RDA qui n'ont eu d'autre choix que de faire le dos rond quand le capitalisme à l'Allemande a pris le relais ?
D'autant que le film ne se borne pas à exploiter une nostalgie pour un régime suranné. Alex ment à sa mère sortie de coma en lui faisant croire qu'elle vit encore en RDA, mais son mensonge va plus loin. C'est aussi une exploration de ses propres sentiments vis-à-vis de la réunification, de ce que lui aurait souhaité pour son pays. Il réinvente donc une RDA rêvée. Une RDA où Coca Cola, au bord de la faillite, demande la protection des conglomérats est-allemands. Une RDA où la réunification est inversée : de plus en plus d'Ouest-Allemands, fuyant le capitalisme et le chômage, demande asile à la bienveillante république socialiste. Il y a quelque chose de très touchant dans ces passages, et notamment dans ces scènes d'anniversaire où les vieux retraités, dont un bourré, viennent offrir au nom du parti une corbeille à Frau Kerner. Et les gamins qui chantent tout faux.
En plus, le happy ending final qu'on aurait attendu est évité, et le film a quelques originalités, comme la scène des retrouvailles du père et de la mère, silencieuse et vue à travers une porte. Il y a juste quelques scènes que je n'aurais pas monté pareil, comme celle où la mère regarde Alex montrer son dernier gros mensonge, sans être dupe. Un peu trop de champ-contre-champ. Bon, il y a aussi quelques allusions cinématographiques cachées, je pense : le landeau sur lequel trébuche Alex dans l'escalier fait penser à celui du Potemkine ; la statue de Lénine au bout d'un hélicoptère (y'avait des crédits, vingt dieux !) évoque à la fois le début de "8 et demi" et une séquence du "Regard d'Ulysse" d'Angelopoulos. J'ai sûrement loupé d'autres allusions.
"Goodbye Lenin" est une comédie qui mêle à la fois un sujet passionnant, une intrigue simple à suivre et un montage plutôt raffiné. Seul véritable bémol - subjectif hein - la BO avec le thème geignard au piano qui revient. Là j'avoue que je n'ai pas accroché.