En effet, difficile de ne pas noter la flagrante ressemblance avec le chef-d'oeuvre de Corbucci, sorti la même année. Les mêmes étendues eneigées, silencieuses, les mêmes personnages aussi sombres qu'une flaque de pétrole, le même univers qu'Humanité semble avoir déserté. Les chasseurs de primes et autres pistoleros sont içi des samouraïs errants et les flingues tonitruants deviennent des sabres acérés.
Rien de nouveau, l'influence mutuelle du western et du chambarra n'est plus un secret.
Mais dans le cas présent, la ressemblance se retrouve aussi bien dans la forme que dans le fond. Le nihilisme est de mise, et le jugement est sans appel : Ce monde est pourri. Les valeurs ont été abandonnées, la cupidité et l'injustice dévorent le monde comme un cancer. Cette gangrène transparaît aussi au travers de l'anti-héros mutique du film, aussi ambigu que tous les autres personnages.
Là est tout le génie de Goyokin; le héros de l'histoire ne cherche à sauver ou protéger personne, mais cherche seulement un moyen de se racheter à ses propres yeux. Un personnage à l'image du métrage, mélancolique et désabusé, s'éclipsant dans la brume enneigée une fois sa quête accomplie. Le contexte historique dans lequel Hideo Gosha place son film illustre lui aussi cet aspect: la fin d'une ère, la déconstruction de la chevalerie japonaise et de ses codes moraux, et cetera. Parallèle intéressant avec le genre même du film de sabre, qui arrivait alors en bout de course, les histoires de personnages emplis de valeurs morales tombant alors en désuétude.
Un testament du chambarra, qui parvient malgré sa déconstruction assumée du genre, à en devenir un étendard, ouvrant la voie à une nouvelle ère. Une pierre angulaire du film de samouraïs, et du cinéma japonais en général.