Le rabattage médiatique autour de Grand Central a fait son effet : on commençait à attendre beaucoup de ce qui se présentait comme une histoire d’amour sensuelle et vibrante sur fond de chronique sociale, dans le milieu des ouvrier de l’énergie nucléaire. Beaucoup aussi du couple d’acteur, la « nouvelle star » Léa Seydoux, puisque le film arrive un peu plus d’un mois avant La Vie d’Adèle, et le magnifique Tahar Rahim, qui ne fait que confirmer son talent hors norme depuis sa première apparition. Ce type de promotion, si elle donne une belle chance à un second film, est aussi dangereuse et se doit ainsi d’être bien dosée. La déception peut être proportionnellement grande à l’attente que le film suscite. Alors, ça passe ou ça casse ?
Les intentions de la jeune et très douée réalisatrice de ce film, Rebecca Zlotowski, sont aussi claires que théoriquement impeccables. L’amour et la radiation, même combat : on peut vite voir son cœur s’emballer, sentir ses jambes trembler, perdre le contrôle. Dans la centrale et dans un champ l’avoisinant, Gary prend des risques et tout se mélange. Il a besoin de la Centrale pour gagner de l’argent mais aussi pour rester dans cette communauté, auprès d’une jeune femme à laquelle il devient accro, et puis ce danger, ces dangers, ça commence à le fasciner. Combien de temps il va rester, combien de temps ça va durer ? Car Carole est presque aussi toxique que les produits qu’on côtoie à la Centrale : séductrice, sexuelle, et surtout bientôt mariée à un des gars de la Centrale qui est aussi en quelque sort un mentor pour Gary. Gary dont le passé trouble donne la sensation qu’il pourrait lui aussi exploser d’un moment à l’autre.
La camera de Zlotowski quand elle adopte une posture réaliste voire naturaliste fait mouche : le regard posé sur ces corps dans ce milieu qu’elle a visiblement bien étudié est aussi précis qu’emprunt d’élégance. Les beaux cadres, la lumière très travaillée offrent un film généreux, qui n’hésite pas à s’aventurer vers un certain lyrisme, à l’instar des films d’Audiard que certaines rumeurs présentent comme le compagnon de la réalisatrice (et qui est quoiqu’il en soit remercié à la fin du générique, ce qui laisse croire à une réelle influence, sans compter la présence du prophète Tahar dans le film). Les scènes dans la centrale, presque documentaires, prennent parfois soudainement l’allure de scènes d’action. Zlotowski maitrise ainsi l’art de la dramatisation, et sa direction d’acteurs est tout aussi remarquable en particulier pour les scènes masculines.
Mais là où le film déçoit de façon surprenante, c’est par le traitement de son intrigue amoureuse... (...)