Grave c'est d'abord l'histoire d'une initiation, celle de Justine. Comme le reste de sa famille elle entre dans une école vétérinaire. C'est dans cette atmosphère glauque et bétonné qu'elle va apprendre à se connaitre et à comprendre ses pulsions. Pour elle, c'est le début d'une nouvelle vie, la découverte du bizutage universitaire, la sortie de l'autorité parentale et le début de la sexualité. Elle est aidée dans sa quête existentielle par sa sœur, incarnant les pulsions jusqu'à leurs paroxysmes, et son colocataire gai, lui aussi en recherche de sensations nouvelles, n'ayant pas réussi à se trouver.
La jeune végétarienne se voit forcé de manger de la viande. C'est à partir de là qu'elle va changer, elle va se mettre à l'aimer, à l’apprécier, à l'engloutir. Ce gout de la viande va peu à peu se changer en gout pour la chaire humaine. Ses pulsions primaires et animales surgissent (un peu vite il faut bien l'avouer). Elle va être guidée par ses nouvelles pulsions durant tout le film, devenant peu à peu sauvage.
La réalisation est rafraichissante avec de bonnes idées, notamment l'utilisation des reflets. Elle oscille entre pure réalisme et des scènes symboliques, sans jamais trop en faire. La photographie et les acteurs sont très bons. Mention spéciale à Garance Marillier qui joue Justine tout en finesse tout en gardant une animalité singulière.
Le film ne juge pas ses personnages, malgré leurs différences. Comme la médecin au début du film qui parle d'une adolescente en surpoids. Il se contente d'exposer des faits souvent dérangeant, ne laissant pas indifférent. Même si les actes commis par les personnages sont atroces, la caméra n'est pas manichéenne, elle ne va pas chercher à savoir qui a raison ou qui est en tord. Le sort de Justine c'est elle qui l'a entre les mains. Son animalité qui ressort est présente pour nous rappeler que nous ne sommes, nous être humains, que des animaux. Comme Justine le dit dans un passage au début du film, violer un singe ne serait-il pas aussi horrible que de violé un humain ? Alors pourquoi ne pas penser la même chose de la nourriture, manger un blanc de poulet serait-il aussi horrible que de manger un steak d'humain sur son lit de pomme de terre ?