Grosse claque dans ma face. Bon j'ai peur de l'espace. De base. Alors forcément là j'étais servi. C'est comme tout le monde le dit ou presque une expérience viscérale, qui prend tout son sens dans une salle avec un grand écran, une bonne sono, et, oui, en 3D.
Le travail sur le visuel est époustouflant : c'est incroyablement bien fait, déjà (c'est du quasi 100% virtuel et on ne remet jamais en doute la véracité de ce qu'on voit à l'écran) . C'est beau en plus (l'espace c'est photogénique, mais on atteint des sommets ici). Et surtout, le mec sait filmer. Les plans séquence de 15 min seraient des gadgets marketing et tape à l'oeil si ils n'étaient pas aussi bien foutus et impliquants pour le spectateur. L'ouverture du film est quand même un sacré morceau de bravoure. En un plan fluide, on passe d'une scène d'exposition à une scène d'action (dantesque) , avec au milieu tout ce qu'il faut pour s'attacher un minimum aux personnages. Bluffant. Ensuite la 3D est super bien utilisée, c'est rien de le dire, et quand on voit Bullock dériver dans un champ d'étoiles et ne devenir qu'un point brillant parmi les autres, ça noue les boyaux.
Ensuite, le travail sur le son est presque encore plus dingue, à part la musique, mais j'y reviendrai plus loin. Dans l'espace, il n'y a pas de son (un carton un peu inutile nous le rappelle au début du film) , on ne perçoit en sourdine que les contacts directs avec la combinaison des astronautes. Et ça sera respecté sur toute la durée du film. Ca renforce le sentiment de claustrophobie déjà bien violent , et ça permet de se faire des petites frayeurs bien sympathiques par exemple quand une station spatiale se désintègre derrière Sandra Bullock et qu'elle ne voit rien, la pauvrette. La plupart du temps, on est juste avec ces quelques sons sourds et les voix mais aussi surtout les sons de respiration des 2 personnages. On est maintenus dans un état de tension folle rien que parce qu'on entend ces souffles lointains mais tellement proches grâce aux communications radio. La spatialisation est parfaite, dans une salle classique, je n'ose même pas imaginer ce que ça peut donner dans une des rares salles en Dolby Atmos.
De part sa facture si spécifique, ce film perdra tout intérêt sur un écran d'ordi minuscule en 2D et avec un son qui crachouille en stéréo. Mais du début à la fin on est vissés à son siège, on est en immersion complète et en empathie avec ces personnages, et c'est la grande force du film. Après , il y a quelques soucis qui viennent gâcher un peu le plaisir : Un jump scare pas très utile, dans un film qui arrivait très bien à me terrifier sans cet artifice un peu éculé. Une tentation de faire chialer tout le monde dans les chaumières avec du pathos bien lourdingue a base de relation mère fille brisée par le deuil... Un sacrifice super prévisible et bien tire larmes typique , ça m'a sorti du film parce que je me suis rappelé tous les autres films idiots où ce genre de trucs arrive. La façon un peu systématique qu'a Sandra Bullock de se sortir de chaque situation in extremis pour 2 minutes plus tard tomber sur une autre situation horrible.Une tendance un peu lourde à faire parler Sandra Bullock non stop, quitte à lui faire dire des blagues un peu nulles pour détendre l'atmosphère, ou à meubler le silence (silence qui aurait été surement plus intense, finalement). C'est pas facile de faire un film avec 2 personnages en les laissant se taire un peu, mais je pense que c'était possible. Et enfin la musique, qui quand elle devient vraiment trop présente à partir du dernier tiers, gâche vraiment tout. C'est pompier, trop fort, gnan gnan (les choeurs!!) - On dirait la musique d'Avatar. Je crois que Cuaron avait pour projet de ne pas mettre de musique, je pense que ça aurait été bien mieux, et pas moins prenant.