L'acteur Artus de Penguern a la physionomie d'un Buster Keaton ou d'un Pierre Etaix. Et, en tant que réalisateur, le style et l'humour noir de de Penguern peuvent éventuellement rappeler le cinéma de Jean-Pierre Jeunet. Forte de ces familiarités, la comédie séduit au début par ses effets de mise en scène et une certaine causticité. Avant de s'essouffler. Et c'est un premier film ambitieux mais pas tout à fait maîtrisé qu'il nous est donné de voir.
Grégoire Moulin, stressé, timide, voire couard, s'apprête enfin à rencontrer cette Mademoiselle Bonheur que depuis des semaines il craint d'aborder. C'est sans compter sur une série de contre-temps, de mauvaises rencontres et de péripéties loufoques qui retardent son rendez-vous avec la belle. Une soirée de cauchemar attend Grégoire Moulin -comme celle, sur le principe du moins, que vit Griffin Dune dans "After Hours" de Scorsese- dans un Paris désert pour cause de finale de foot.
Mais, au-delà de cette aventure absurde et trépidante, permise par des ficelles un peu grosses, c'est une vision désespérante de l'humanité que propose le réalisateur. A la beauferie bien connue des supporters et amateurs de foot s'ajoute toute une collection de comportements méchants, frustes, déviants, au contact desquels Grégoire Moulin, et accessoirement la romanesque et maladroite Mademoiselle Bonheur, font figures de tendres dans un monde de brutes.
Cette noirceur, cependant, où la caricature s'avère un peu lourde, relève, semble-t-il, davantage d'un exercice de comédie que d'un postulat abouti. Le héros est assez terne, tandis que les autres rôles n'on pas la saveur ni la truculence qu'on peut trouver dans la comédie italienne, pas avare en "monstres".