Habemus Papam par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Le Vatican est en effervescence, le Pape est décédé. Les fidèles par milliers envahissent la Place Saint-Pierre afin de découvrir le nouvel élu. C'est à l'issu du Conclave que le monde connaîtra le nouveau souverain pontife mais les débats risquent d'être longs compte-tenu du nombre de candidats. Enfin une fumée blanche s'élève, les chants et les acclamations commencent à se faire entendre de la place bondée mais le balcon reste orphelin de son souverain. La planète est en ébullition car le motif de ce grave contretemps doit être gardé secret coûte que coûte jusqu'à ce que le nouveau pape se décide enfin à endosser sa nouvelle fonction.


Qu'arrive t-il donc à ce pape élu par les membres du Conclave ? La raison la plus plausible: l'appréhension de se retrouver face à une telle responsabilité. La tâche terrible que représente cette haute fonction est susceptible de faire reculer un homme, de remettre en cause sa vie, ses habitudes. Effectivement subir les contraintes, prendre des décisions importantes, devenir la cible des médias sont des obstacles que le nouveau pape ne se sent pas le courage de supporter. Un psy appelé en urgence pour la circonstance par les hautes autorités du Vatican va tenter de galvaniser le Saint-Père à bout de force et désemparé. La fugue sera pour lui un remède personnel très appréciable, un remède qui va lui permettre de découvrir la société telle qu'elle est et il va s'en émerveiller au point de ne plus vouloir se réfugier dans sa haute fonction qu'il juge impossible à surmonter.


L'attente se poursuit, les fidèles s'inquiètent. Les membres du Conclave condamnés à rester cloîtrés au Vatican en attendant la présentation du pape sont manipulés par les plus hautes instances de la religion à la recherche du fugueur. Pendant ce temps notre psy tente de détendre l'atmosphère en organisant des tournois de jeux de société et de sports. Ces braves gens montrent durant cette attente leur véritable personnalité. La religion passe bien souvent à l'arrière plan face à leur ego. Leur véritable visage se dévoile au fil de cette attente interminable.


Nanni Moretti est franchement un réalisateur plein de talent car il nous entraîne dans un univers peu connu de nous tous en le décortiquant d'une manière très pertinente. Bien sûr les réactions des différents protagonistes de cette histoire sont peut-être caricaturales mais elles sont sur le fond très réalistes. Il nous fait entrer dans un monde secret, un monde où les combines, les luttes d'influences, les calculs en tous genres sont monnaie courante, le respect des autres et de la religion passant bien souvent au second plan. Michel Piccoli est remarquable dans son rôle ingrat. Il force la sympathie et le respect face à la situation tragique dans laquelle il se retrouve. Même un pape peut être victime d'une dépression à la prise de conscience de la tâche qui se dresse devant lui. Il peut aussi douter en se retrouvant dans le monde réel. Autour de lui nous ne retrouvons que d'excellents acteurs très crédibles à l'exemple de Nanni Moretti, le psy consigné au Vatican afin de faire revenir le pape au plus vite sur sa décision en explorant sa vie et en jouant un rôle d'animateur afin de faire patienter de son mieux des cardinaux devenus inquiets et suspicieux. Jerzy Sttuhr nous campe magnifiquement un porte-parole du pape aussi stressé que manipulateur à la recherche du fugueur. Bref, la distribution est parfaite et nous fait passer un moment étrange dans ce lieu avec ses cérémoniaux assez inhabituels pour nous.


Je vous conseille donc vivement ce film étrange, passionnant et esthétique de Nanni Moretti dans lequel vous pourrez assister à de grandes performances d'acteurs. L'œuvre qui ne put être tournée au Vatican compte-tenu de la rigidité de certaines personnalités de ce lieu enfermant tant de secrets fut présentée lors du Festival de Cannes 2011.

Grard-Rocher
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le 26 sept. 2014

Modifiée

le 22 sept. 2014

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