Hadewijch prend place dans ce que l'on pourrait appeler l'époque "radicale" de Bruno Dumont (L'Humanité, Flandres). On pourrait même dire que ce film ouvre un diptyque sur le radicalisme religieux, partageant tout deux l'acteur David Dewaele : Hadewijch donc en 2009, et Hors Satan en 2011. Ainsi, Hadewijch tenterait d'apporter un regard sur cette question qui semblerait si vaste : qu'est ce que c'est de croire ? Peut-on croire de trop, ou modérément ? Il y'a en tout cas chez le personnage de Céline (Julie Sokolowski), ou d'Hadewijch selon les lieux, un oubli certain du sacré dans le rapport à dieu. C'est le corps qui prime ! Autant celui du christ, que celui de Céline. Bruno Dumont rétréci ainsi son cadre, limitant ses grands plans larges habituels pour revenir à un rapport humaniste. Peut-on encore parler d'un dévouement corps et âme lorsque le corp prend une si grande place ? Dans ses différentes (et dangereuses) rencontres, la notion de martyr vient ainsi à Céline comme une apparition divine. L'amour et la croyance deviennent une affaire matérielle, ancré dans la terre et la violence. Elle est irraisonnable, vouée à un amour invisible et troublant.
Bruno Dumont donne une densité incommensurable à la surface de ses films. Nous-mêmes, spectateurs, vouons un culte à une certaine puissance invisible qui remplie les films de Dumont. Mais il y'a toujours quelque chose qui vient percer le cadre, à un moment ou à un autre. C'est pour cela - en autres parce qu'il y'a tant de raisons - que j'aime son cinéma : il relève du miracle, ou de son attente ! Tout cela serait à l'image de Céline, méditant avec passion et dans un turbulant questionnement, l'arrivé de son amour : une éclaircie subite sur son visage; une pluie battante qui vient croiser Céline, enfermée par la religion, et David (David Dewaele) à peine libéré par la société.