De ce que j'ai vu de King Vidor, il y a une constance qualitative que j'apprécie chez lui. Certes, je ne me suis jamais ramassé de claque mais jamais non plus de déception. Hélas, "Hallelujah" en qui je plaçais beaucoup d'espoir fut une assez mauvaise expérience alors que tout était là pour donner lieu à un bijou. Qu'on se le dise, je ne fricote aucunement avec la bien-pensance. Au contraire, c'est avec une joie non dissimulée que je défèque allègrement dessus. Je ne suis pas non plus du côté des ouin-ouin qui sont scandalisés pour des broutilles ou vont jusqu'à crier à la polémique sur un film sorti il y a plus de 60 ans sans réaliser que les moeurs n'étaient pas les mêmes. L'exemple le plus marquant étant "Autant en emporte le vent".
Néanmoins, je me suis retrouvé devant un cas de conscience hier tant l'oeuvre sonnait faux de A à Z. Encore que si ça s'était limité à une simple faute de goût, la pilule serait passée. Comment croire un seul instant au fait que les esclaves noirs des champs de coton ramassent celui-ci dans la joie et la bonne humeur en entonnant un petit chant, le sourire aux lèvres, à la gloire du coton ? Que l'on m'excuse mais étant un fana de véracité historique, je crois qu'il n'est pas nécessaire de rappeler les conditions atroces des noirs exploités. Sauf qu'ici tout se fait dans la la bonne humeur. Je ne parle pas de jouer la carte du misérabilisme car ça serait devoir choisir entre la peste et le choléra mais un peu de tenue au vu de la souffrance passée ne serait pas un mal.
Déjà pas mal refroidi par cela (sans pour autant aller lâcher un tweet hystérique car je hais ce réseau social là), la suite n'allait pas en s'arrangeant. King Vidor fait montre de peu d'inspiration en claquant un scénario des plus maladroits tirant bien plus dans le gospel et l'extatisme religieux qu'une histoire digne de ce nom. Les personnages sont caricaturaux, en particulier Chicken qui est de mémoire la plus mauvaise vamp que j'ai vu à l'écran, et ça gueule, ça gueule pour dire encore et encore la même chose. Tout devient prêche à la gloire du Seigneur avec un Zeke prédicateur qui aura bien du mal à réfréner ses pulsions malgré le coup de p*te que Chicken lui a fait. Une bien belle poire qui se fera une deuxième fois mener en bateau. Le tout s'éternisant sur une dernière partie s'étirant pour rien.
Au final, Hallelujah ne raconte pas grand chose de vraiment passionnant et ne peut s'appuyer que sur un beau noir et blanc et ses décors (en particulier le bayou). Un exemple de film ayant très mal vieilli et qui, même en se replaçant dans le contexte de l'époque, est au mieux naïf, au pire réducteur. Et c'est la première fois que j'en viens à dire ça. Comme quoi, il faut un début à tout.