Le génial créateur de "Mad Max", désormais reconverti dans le cinéma familial, récidive ici dans le film animalier après sa série des "Babe", mais se confronte cette fois à l'animation digitale, tentant de battre Pixar et Dreamworks sur leur propre terrain.
Vendu comme une production inoffensive pour bambins par le studio, "Happy feet" offre effectivement pendant une heure une comédie musicale animée et endiablée, à la morale bienveillante prônant la différence et la tolérance, s'autorisant tout de même quelques écarts muy caliente, au son d'une bande originale efficace et porté par un casting vocal impeccable si l'on excepte les minauderies habituelles de Nicole Kidman, heureusement peu présente. Mais c'est sans conaître le génie de George Miller, qui va orchestrer un des plus grands détournements de films familiaux.
Après avoir offert aux spectateurs ce qu'ils sont venus voir (des adorables pingouins qui chantent), le cinéaste va les conduire vers un territoire inattendu, plus mystique, à la lisière du fantastique, le spectacle musical se métamorphosant en fable écologique. Tout en pointant du doigt la tendance de l'homme à pervertir l'environnement auquel il appartient (rien de neuf là-dedans mais le propos à le mérite d'exister), Miller va surtout renvoyer au spectateur son propre regard condescendant envers l'animal, l'être humain ne daignant prêter attention à la cause animale majoritairement dans le cas où l'espèce concernée présente une physionomie agréable (il est plus facile d'éprouver de l'empathie pour un panda que pour un requin) ou une spécificité qui lui est propre, en témoigne toute les vidéos ridicules (et humiliantes) pullulant sur le net. Un propos incroyablement pertinent, Miller ayant bien compris qu'il devait passer par un emballage "mignon" s'il voulait faire passer son message, à l'image du héros du film.
Sûrement condamné à l'incompréhension (putain les mecs, réveillez-vous !), "Happy feet" est pourtant un véritable petit bijou, d'une maîtrise technique ahurissante (imaginez un peu la tonne d'information à gérer avec tous ces pingouins), résolument optimiste malgré sa critique sévère, drôle (les pingouins latinos, à se tordre), plus d'une fois impressionant (l'attaque des orque), expérimental (les humains sont joués par de véritables comédiens) et carrément euphorisant.