Depuis quelques temps, je me suis lancée dans la longue aventure qu’est le visionnage de « vieux » films japonais. A chaque début de film, j’ai commencé par me demander dans quoi je m’étais embarquée : "est ce que ça va me plaire ? J'espère que je ne vais pas m'ennuyer...", et pourtant, à chaque fois ça n’a pas loupé, je me suis retrouvée ébahie à la fin du film, je n'ai pas vu le temps passer tellement j'étais captivée par ce que j'avais devant moi.
Et en effet, Harakiri n'a pas dérogé à la règle : j'ai d'abord eu ce petit sentiment de peur, peur que le film ne me plaise pas, et pourtant... pourtant je me suis laissée entrainer dans le monde des Samouraïs plutôt facilement et rapidement, j'ai presque directement accroché à cette double histoire qui nous est racontée.
Oui, Kobayashi a trouvé une manière toute particulière de nous conter l’histoire de ce Samouraï qui décide de se rendre au château du clan Li afin de pratiquer le rituel du Harakiri, rituel consistant en fait à un suicide pur et simple : il nous emmène dans un récit parsemé de flashbacks qui vont en fait nous aider à comprendre le pourquoi du comment, et qui de plus approfondissent le développement de Tsugumo, le personnage de Tatsuya Nakadai, personnage d’une grande complexité.
Ces flashbacks permettent de contraster entre le Tsugumo du présent et le Tsugumo du passé, et de nous montrer toute la force du personnage à travers l’histoire qu’il a vécue, et tout ce par quoi il est passé. De plus, il faut noter que, bien que Tsugumo soit le personnage principal, tous les personnages secondaires sont également très bien travaillés, et chaque petit détail est traité avec soin.
Il nous offre une mise en scène absolument magistrale, c’est impressionnant de voir à quel point il arrive à rendre intéressant un film dans lequel les personnages restent assis à parler (pour ce qui concerne les scènes du présent tout du moins) presque tout du long. Kobayashi joue entre la tension et l’émotion, on finit par ressentir de l’empathie pour les personnages qui au départ n’apparaissaient pas pour de potentiels « méchants ».
Et nous suivons finalement tout cela sans jamais nous ennuyer, jusqu’au grand final qui est absolument époustouflant.
La musique (ou absence de musique) joue également beaucoup, et accentue le côté sombre du film.
Mais il n’y a pas que le côté scénaristique qui est intéressant dans Harakiri, c’est aussi ce qui en découle, c’est-à-dire une certaine critique des valeurs japonaises de l’époque, la pauvreté et la cruauté et la misère, la condition humaine au milieu de cette hiérarchie impitoyable. Il nous montre de manière fort admirable jusqu’où est prêt à aller un homme plongé dans la misère, pour essayer de s’en sortir. Il dépeint cette misère, et les conséquences qui en découlent, de manière très réaliste, et force le spectateur à s’interroger sur tous les aspects de cette société féodale.
Finalement, Harakiri est donc un pilier du cinéma japonais, maîtrisé avec brio à tous les niveaux, où le fond et la forme se fondent en une alchimie parfaite, un vrai régal (si j’ose dire), entre les scènes de présent et de passé, les scènes de discussions et les scènes de combats, la plus marquante restera selon moi la scène de harakiri de Chijiwa, qui m’a fait ressentir toute la douleur du personnage.