Neil Labute, après un petit détour par la série B avec son remake Z de "Wicker Man", revient à ses premiers amours, c'est-à-dire une histoire centrée avant tout sur le relationnel, les dialogues.
Et même s'il n'est pas l'auteur original de ce scénario, il se l'approprie bien et se montre généreux. Le film traite de racisme, il est vrai, mais ce serait réducteur de ne le résumer qu'à ça. En effet, les personnages sont si creusés, et le cas tellement individualisé qu'on aurait pu n'avoir qu'une seule ethnie, je ne pense pas que ça aurait changé quelque chose aux évènements. C'est sans doute ce qui est fort avec ce scénario, on traite plus de la volonté de détruire l'autre que vraiment du racisme ; le racisme n'est en fait qu'un prétexte pour ce faire. Autre intérêt, la façon dont les personnages vont s'en faire baver l'un l'autre : l'enfer, c'est les autres, Neil démontre très bien cette expression. Les situations sont sadiques. Je regrette d'ailleurs que sur la fin les auteurs aient craqué et opté pour un règlement de compte plus physique. Notons également les références au film "Do the right thing" dans la façon de dresser un parallèle entre la rage sociale et la chaleur envahissante.
Si "Wicker man" a été très mal reçu, Neil s'est tout de même fait les armes sur ce film. Car clairement sa mise en scène n'a plus rien à voir avec celle de ses premiers films. Une image moins auteurisante, plus classique, une photographie plus léchée aussi. Et enfin un découpage sobre efficace tant dans les dialoques que dans les scènes d'action. Les acteurs font un très bon boulot aussi. J'aurais peut-être préféré que Neil fasse appel à son vieux copain Aaron Eckhart, mais ce sera peut-être pour un prochain film ?
Bref, "Lakeview Terrace" devrait plaire aux fans de la première heure du réalisateur, même si la fin trahit la volonté de se tourner vers un cinéma hollywoodien plus vendeur. Je vois que le bougre a réalisé un film passé inaperçu, "Some velvet morning", dont le pitch rappelle les premiers films de Neil ; après ça je vois qu'il a deux longs métrages en production, dont un avec Matthew Broderick, l'autre avec Ethan Hawke (possible changement). Faudra que je choppe tout ça !