J’ai vu Her peu après sa sortie. Je ne me souvenais de rien, au point de le dé-voir: ce phénomène ne touche le cerveau que faisant face à une menace ou à un dérangement particulier, et maintenant que je suis rebriéfé, le particularisme offensant était le sexisme.
Ce qui aurait pu être un questionnement intelligent sur l’évolution des IA et le fait qu’elles commencent en étant un instrument parfaitement servile, esclave de son propriétaire se ramasse un mur contre la gueule parce que son esthétique en couleurs chaudes sci-fi soft et sexy annihile tout. On n’est pas en train de voir comment est-ce que les relations humain machine pourraient effectivement fonctionner hors du copier coller d’un modèle dream manic pixie girl et d’un sadboi à qui il n’est jamais rien arrivé. J’aurais cru qu’il s’agissait d’un film qui s’attache à explorer le sens du compagnonnage qu’une IA de ce niveau est capable d’accomplir, et / ou à voir des situations qui sont de véritables sans retour. Ici l’IA finit par disparaître, et notre héros est désormais guéri de sa difficulté d’entretenir des rapports amoureux non-égoïstes parce qu’un ordinateur et sa meilleure amie lui ont parlé gentiment.
Même dans la scène qui pourrait éventuellement tomber sous les lois de traffic d’être humain (rechercher des sujets volontairement sélectionnés pour être instables mentalement à des fins sexuelles... le code pénal on en parle?), tout est tellement léché et surtout organisé pour montrer que les femmes sont des perverses hystériques qui "pleurent tout le temps" comme dit le personnage du jeu vidéo auquel Theo joue.
Je pensais que tous ces clichés étaient là pour être déconstruits de l’intérieur, et avoir un indice éventuel que l’IA était plus que ça. On essaye de le faire sentir vers la fin, mais cela ne produit pas le sentiment de non-retour et d’arrivée de nouveaux paradigmes logiques, comme cela aurait pu être intéressant.
Quant au prétendu "commentaire" sur le male gaze, on se contente de nous montrer à quel point c’est cringe, faisant en sorte qu’il faille quand même se taper les phantasmes mièvres et dénudés de Théo et entendre Scarlet Johansson faire semblant d’hyperventiler. Tout ce qui concernent les femmes, naturelles et artificielles, n’a aucun sens dans ce film. Ça aurait pu, et ça n’a pas venu.