Je suis allé regarder Heretic principalement pour voir Hugh Grant dans un rôle plus exigeant que celui de beau gosse romantique qui lui a collé à la peau pendant une partie de sa carrière. Le voir enfin s'arracher de ce carcan pour faire du Guy Richie ou du film d'horreur me fait le plus grand plaisir, d'autant plus que le bonhomme s'est absolument bonifié avec le temps et je lui trouve un physique bien plus intéressant aujourd'hui que lorsqu'il était tout lisse et charmeur.
Et au final, Hugh Grant est la principale attraction d'un film que j'ai trouvé sympa, mais qui ne m'a pas spécialement bouleversé. J'apprécie que son déroulement reste surprenant du début à la fin, et que je ne sache jamais vraiment à quoi m'en tenir ni où on voulait m'emmener. C'est quelque chose que j'apprécie de plus en plus au fil du temps, et Heretic s'en tire très bien pour rester imprévisible, sans pour autant faire n'importe quoi avec son script.
En revanche, le film abuse des promesses dramatiques, en faisant vivement monter la sauce à coup de répliques tonitruantes sur l'importance capitale de ce qu'on va nous révéler, qui va ébranler nos convictions les plus profondes et éroder notre santé mentale. Si bien qu'à l'arrivée, on ne pouvait qu'être déçu. En plus de ne pas tenir ses promesses, la fin part en vrille avec du gros Deus Ex Machina, ce qui est un comble pour un film qui démonte la religion.
C'est là le thème central du film, et ce qui en fait une oeuvre calibrée pour un public moins agnostique que moi, qui pourra se sentir remué, offensé dans ses convictions. Le discours est intéressant et les joutes verbales entre les personnages ne manquent pas de mordant, mais j'ai quand même du mal à m'émouvoir quand on m'explique ce que je considère comme des évidences.
Ceci dit, j'apprécie ce parti-pris subversif, car sortir aux US un film aussi brutal à l'encontre du christianisme doit être un sacré chemin de croix. Il n'est pas étonnant de le voir distribué par A24, car la plupart des studios plus grand public auraient tiré une sale gueule en lisant son synopsis.
Parlons un peu de la fin [SPOILER MAJEUR]
Si la fin m'a déçue, c'est d'abord parce que le personnage de Hugh Grant nous fait des promesses sensationnelles pendant tout le film, alors qu'il s'agit en réalité d'un tour de magie un peu vulgaire.
C'est aussi à cause de la copine qui revient d'entre les morts pour donner un coup de bâton, et re-meurt juste après. Évidemment, tout se passe pile au bon endroit et au bon moment. J'avais beaucoup de fins possibles en tête, et à mon sens, ce qu'ils ont choisi est loin d'être la meilleure option.
Dans la dernière scène, l'héroïne vient de s'en tirer in extremis, sauvée par un deus ex machina pour envoyer ad patres le prêtre défroqué. Elle quitte la maison, marche un peu dans le froid, et regarde un papillon se poser sur sa main, en référence à une histoire de réincarnation évoquée plus tôt dans le film.
J'ai lu une hypothèse selon laquelle la copine qui revient à la vie est un ange, et que le décor enneigé que traverse l'héroïne correspond à la lumière blanche que l'on voit en mourant - tout ça pour appuyer le fait qu'elle est morte, et que sa fuite était imaginaire.
Personnellement, je n'avais même pas considéré que la fin était ouverte, vu que l'héroïne est partie pour mourir de froid, dans tous les cas. Savoir si elle est morte dans la maison, ou 200 mètres plus loin, ne me semble pas crucial. Je pense aussi que ce sera tentant pour un spectateur croyant d'essayer de faire entrer une fin angélique au chausse-pied, qui prouverait une présence divine, mais j'ai du mal à l'avaler.
Surtout quand le film vient de passer deux heures à nous expliquer que les dogmes ne sont que des outils de manipulation des masses, et n'ont rien à voir avec l'existence du divin. Le thème central est que le point commun de toutes les religions est d'être prêtes à raconter n'importe quoi pour contrôler ses adeptes. J'ai beaucoup de mal à croire qu'après s'être donné tant de mal, le réalisateur irait saupoudrer tout ça avec des anges et de la résurrection.
Cela dit, c'est peut-être pour ménager la sensibilité de son audience puritaine qu'il a laissé la fin légèrement ouverte, pour que chacun puisse y voir ce qui le rassure.