High-Rise : l’enlisement de la dystopie ?

Malgré des retours assez moyens dans l’ensemble (Ben Weatley semble être un gaillard assez peu apprécié) j’attendais avec une certaine impatience High-Rise, principalement parce qu’on manque affreusement de dystopie ambitieuse dans le cinéma actuel. Les derniers qui me reviennent en tête ? The Lobster, Mad Max, Snowpiercer (et ça remonte déjà à deux ans). C’est relativement peu. Néanmoins, même si le dernier film de Weatley dispose de qualités indéniables, j’ai dû me poser devant le constat suivant : High-Rise ne propose pas grand chose de nouveau.


Enfin, si, ne soyons pas de mauvaise foi, si j’ai pu avant visionnage le comparer moi-même (et lire cette comparaison ici et là) à Snowpiercer pour sa transposition d’un conflit social horizontal à un conflit social vertical, High-Rise apporte un nouvel élément majeur au genre : le conflit n’est plus à la base du film mais arrive en conséquence, et n’est d’ailleurs pas tant social qu’humain (ou plutôt disons individualiste). Ainsi, pas d’exaltation de lutte comme la progression rame par rame dans Snowpiercer, ni de course-poursuite avec poursuivant et poursuivi comme dans Mad Max. Non, ici, le film part sur une base purement utopique de totale mixité sociale. Une mixité hiérarchisée certes, mais qui n’est pas censée opposer de restrictions selon l’appartenance à telle groupe ou classe sociale.


Le problème, c’est le fonctionnement même de l’homme, et de celui de la société de consommation, à travers la figure centrale du supermarché dans le film. Ainsi, si le film montre dès le départ que la mixité sociale cessera bien assez tôt de fonctionner, il tente de montrer ses rouages pendant une bonne moitié de film. Moitié qui fonctionne d’ailleurs assez bien rythmiquement, notamment grâce à une ambiance rétro-futuriste inédite (mélange des années 70 et d’un environnement urbain d’anticipation) et l’avantage de la découverte.


En revanche, là où je pourrai tenter une véritable comparaison entre Snowpiercer et High-Rise, c’est sur la représentation. Dans les deux cas, l’aristocratie est mise en scène de manière hautement vulgaire, pleine de mépris et faisant abondance des ressources comme du pouvoir. Sauf que dans High-Rise, il en va aussi de même pour les classes sociales littéralement plus « basses » qui tentent de rivaliser en soirées et dévergondages. Après tout, on est dans les années 70. Il y est montré aussi une certaine folie, ensanglantée, notamment à travers le personnage du réalisateur de documentaires.


Malheureusement, si cette représentation collait parfaitement à l’ambiance mi-dépressive mi-ironique du film américano-coréen, elle semble déjà un peu plus poussive et éculée ici. En effet, malgré un bon rythme, de beaux plans et un choix structurel global judicieux, il y a beaucoup de paresse dans le déroulement narratif du film. Cette paresse se caractérise notamment par un nombre incroyable de montages musicaux, qui s’ils sont bien fait (et sont accompagnés d’une B.O. excellente par ailleurs) n’en sont pas moins répétitifs à la longue. Pire, ils donnent au film un caractère presque évasif, épars, un peu comme si le réalisateur ne savait pas quoi montrer par moments et se laissait aller à la facilité de réalisation.


Globalement, le film se tient bien, autant dans la mise en place de son univers et de sa richesse que son arrière-propos sociétal. Mais, on pourrait presque dire que cela vient du roman dont le film est tiré, et je me questionne quant à savoir si Ben Weatley a finalement su convenablement le mettre en scène.


High-Rise reste de bonne facture en matière de divertissement, néanmoins il faut bien se l’avouer, on a déjà vu mieux sur (à peu près) le même sujet. Surtout, il n’a finalement suscité en moi presque aucune émotion : pas de dégoût, pas d’exaltation ou de sentiment de révolte. Heureusement, reste l’allégorie sur la société, intéressante sur beaucoup de points.


A retrouver sur mon blog.

Antofisherb
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le 10 avr. 2016

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