House and Freedom
Même si "His House" (spoiler !) n’est pas un chef d’œuvre, et même pas un grand film, il nous réjouit profondément par son originalité et même son audace. Parce qu’il tente un vrai renouvellement du...
Par
le 5 nov. 2020
13 j'aime
Voir le film
Ils ont fui les atrocités et les massacres de la guerre, chez eux, au Soudan. Ils ont traversé des terres, traversé la mer où leur fille s’est noyée, pour finalement se retrouver là, en Angleterre, sous statut de demandeurs d’asile, dans une maison délabrée, en attente de devenir citoyens de ce pays qui les a recueilli. Alors ils attendent, dans cette maison, dans cette ville sinistre, sans pouvoir faire grand-chose parce que soumis à de nombreuses conditions (ne pas rater les entretiens hebdomadaires, ne pas travailler, pas d’animaux, pas d’invités, pas de fêtes, dire bonjour à ses voisins…). Rial et Bol (Wunmi Mosaku et Sope Dirisu, épatants) doivent attendre et, de cette attente, esprits et démons intérieurs vont largement profiter. Profiter pour les tourmenter, les confronter surtout aux traumatismes vécus, aux morts côtoyés et à cette "dette" qu’ils doivent désormais régler.
Pour son premier long métrage, Remi Weekes parvient à conjuguer le genre horreur à la réalité de ces femmes, hommes et enfants cherchant, au péril de leur vie, à échapper à la famine, aux conflits armés et à la mort. Une horreur qui s’avère avant tout intrinsèque, nourrie du vécu de Rial et de Bol. D’ailleurs Rial expliquera qu’elle ne peut avoir peur des fantômes après ce qu’ils ont enduré et parce qu’elle a vu le pire, pire que la légende de l’apeth, ce sorcier qui consumerait les êtres de leurs offenses, que lui racontait sa mère. Le pire, c’est cette folie des hommes dont ils ont été témoins. Cette folie qui gagne Bol face à l’invisible, à ce qu’il ne veut pas voir et qui pourtant investit (altère) aussi bien son âme que la maison.
Weekes avait ainsi toute latitude, à l’instar de Robert Eggers, Trey Edward Shults ou Ari Aster, d’illustrer cette horreur qui puise dans l’intime en privilégiant la suggestion, le peu d’effets, une ambiance. À la place, Weekes se limite un peu trop à du déjà-vu, à de la grosse ficelle : jump scares et apparitions/disparitions soudaines de silhouettes en arrière-plan, plein cadre ou surgissant de l’obscurité (sans parler de ce final attendu, raté et assez laid). Weekes se montre finalement plus convaincant (et pertinent) quand il filme, sans vouloir effrayer à tout prix mais d’abord à faire froid dans le dos, une salle de classe jonchée de cadavres, des bruits dans un mur ou Rial se perdant dans une ville dont les rues deviennent comme un labyrinthe. Ambitieux mais pas complètement abouti, original dans son sujet mais beaucoup moins dans son traitement, His house s’avère in fine plus dramatique qu’horrifique dans l’étude de ce couple déraciné, prêt à se reconstruire malgré le poids du passé et l’incertitude du présent.
Créée
le 11 nov. 2020
Critique lue 330 fois
4 j'aime
3 commentaires
D'autres avis sur His House
Même si "His House" (spoiler !) n’est pas un chef d’œuvre, et même pas un grand film, il nous réjouit profondément par son originalité et même son audace. Parce qu’il tente un vrai renouvellement du...
Par
le 5 nov. 2020
13 j'aime
Disponible depuis hier sur Netflix His House est le tout premier long métrage du britannique Remi Weekes qui en signe également le scénario . Si le fil déboule à point nommé en cette période...
Par
le 31 oct. 2020
12 j'aime
1
Rémi Weeks propose une déclinaison des codes du genre, sans surprise mais sans abuser d'effet. Le cinéaste joue de sons et de jeux de lumière et offre des apartés visuels d'une belle symbolique où...
Par
le 6 nov. 2020
11 j'aime
4
Du même critique
Au clair de lune, les garçons noirs paraissent bleu, et dans les nuits orange aussi, quand ils marchent ou quand ils s’embrassent. C’est de là que vient, de là que bat le cœur de Moonlight, dans le...
Par
le 18 janv. 2017
182 j'aime
3
Un jour c’est promis, j’arrêterai de me faire avoir par ces films ultra attendus qui vous promettent du rêve pour finalement vous ramener plus bas que terre. Il ne s’agit pas ici de nier ou de...
Par
le 19 oct. 2013
180 j'aime
43
En fait, tu croyais Matt Damon perdu sur une planète inconnue au milieu d’un trou noir (Interstellar) avec Sandra Bullock qui hyperventile et lui chante des berceuses, la conne. Mais non, t’as tout...
Par
le 11 oct. 2015
162 j'aime
25