Les bras cassés de la vendetta : hypnose en milieu bordélique

Holocaust Parte Seconda - I ricordi,i deliri, la vendetta

(aka Holocaust 2: The Revenge)


Résumé :


Un groupe secret d'activistes juifs localise et assassine les médecins et les soldats nazis qui ont torturé et assassiné leurs proches dans un camp d'extermination notoire.


Avec un résumé et un titre pareil, on comprend donc que ça va parler de vengeance. Quand on regarde ce film, par contre, on ne comprend plus grand chose, tant l'intrigue est confuse et semble multiplier les coq-à-l'âne scénaristiques.On suit brièvement le groupe d'activistes mentionnés dans le résumé, qui commettent un assassinat ou l'autre, puis on suit un couple de lesbiennes qui veulent également se venger de la mort des proches qu'elles ont perdu dans le camp où elles étaient retenues lorsqu'elles étaient enfant. Ce rafistolage provient du fait que le réalisateur, un certain Angelo Pannacciò, a tourné ce film a différentes époques. Il a en réalité repris des bobines d'un de ses précédents films, tourné en 1972 et resté inachevé pour des questions de budgets de production. Ce film non terminé s'appelait "Subliminal – Una splendida giornata per morire" (soit, traduit littéralement : "Subliminal - Un journée splendide pour mourir"). Le film raconte l'histoire d'une femme dotée d'un énorme pouvoir mental, obtenu à la suite d'expériences médicales nazies qu'elle a subies dans son enfance, et qu'elle utilise pour contrôler et pousser une jeune fille à tuer ses anciens tortionnaires nazis.

En 1978, suite au succès de la mini-série "Holocaust", qui mettait en scène pas moins que Meryl Streep, James Woods et Michael Moriarty, le cinéaste italien décide de réaliser une fausse suite à cette mini-série avec un film intitulé "Holocaust 2". Pannacciò, avec cet "Holocaust 2" (sous-titré "Les souvenirs, les délires, la vengeance"), reprend son précédent film inachevé "Subliminal - Une splendida giornata per morire", et y rajoute de nouvelles séquences tournées tournées quelques années plus tard, dans le but de surfer sur le succès de la mini-série. Un vrai Godfrey Ho transalpin, pour le coup! En Italie, les ersatz en version bis de films à succès étaient légion à cette époque.

Le mélange d'anciennes bobines avec de nouvelles ne donne pas un résulat des plus homogènes, c'est le moins que l'on puisse dire. On peut cependant remarquer, dans les points forts du film, certaines séquences des plus intrigantes, comme celle où Dorothea, (interprétée par l'actrice Kai Fischer, une splendide rousse aux grands yeux envoûtants), se met à hypnotiser sa conjointe Lucilla (jouée par la non moins jolie Susanna Levi). Un plan isolant ce regard intense face caméra, renforcé d'une longue durée confinant au surréalisme, imprime la rétine durablement... Ou encore, cette autre passage où les activistes juifs capturent un ancien docteur nazi et attachent le vieil homme nu sur une table. Un gros plan isole le visage de ce sinistre personnage (joué par Nino Musco, présent dans "Barbarella") qui semble pousser des cris d'horreur mêlés de rire, pendant une longue durée. Au moment où il décède, on s'aperçoit que depuis le début de la séquence, une chèvre était en train de lécher ses pieds nus, pour le chatouiller interminablement,jusqu'à provoquer un arrêt cardiaque. Une séquence "à mourir de rire", donc, si j'ai bien compris.

Les séquences dans les camps de la mort, en flashes-back, sont quant à elles bel et bien horrifiques, sans ambiguïté aucune, même si filmées un peu de travers, comme une bonne partie du film. De plus, le cinéaste ajoute dans son générique de début des photos d'archives véridiques montrant les atrocités des camps. Le titre, d'une certaine manière, ne ment pas : les souvenirs se mêlent aux délires cinématographiques en tous genres, le tout agrémenté, si l'on peut dire, d'un aspect "vengeance" des plus étranges et ridicules. Cette hybridité totale donne l'impression d'être face à l'équivalent du "Plan 9 From Outer Space", du fameux Ed Wood, mais pour la nazisploitation.

Au casting on trouve également William Berger (vu notamment dans des westerns comme "Keoma" ou "Le dernier face à face"), une bonne "gueule" du bis italien. Tina Aumont (vue dans "Torso" de Sergio Martino, mais aussi dans le sulfureux "Salon Kitty" de Tinto Brass) y interprête ici la mère de Dorothea, dans les scènes de flashes-back, violée et tuée dans un camp par des soldats nazis, sous le regard de sa fille et d'autres enfants. Gordon Mitchell trouve aussi sa place dans ce film, acteur à la très longue filmo, vu dans pléthore de westerns spaghetti (au hasard, "Sartana... si ton bras gauche te gêne, coupe-le!") ou autres bisseries italiennes (citons par exemple "Blood Delirium", de Sergio Bergonzelli).

Un critique italien, un certain Fabio Melelli, a parlé du réalisateur Angelo Pannacciò en ces termes: "Réalisateur de films de série Z, certains d'une laideur hallucinante [...] l'un des prétendants les plus sérieux au titre de pire réalisateur de l'histoire de notre cinéma". Je ne sais pas, pour ma part, s'il s'agit du pire, mais pour avoir vu également un autre de ses films, "Les anges pervers" ("Il sesso della strega", 1970), on peut dire que ce giallo aux tendances vaguement gothiques est également très confus scénaristiquement, et déploie aussi quelques séquences furieusement intrigantes, plongées dans une ambiance étrange plutôt réussie. D'autres, toutefois, font preuve d'un surréalisme qui ne semble pas cent pour cent volontaire.

JJC
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le 15 août 2023

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