Réalisé en 1983 pour une Shaw Brothers déclinante, Hong Kong Playboys est l'occasion pour Wong Jing de s'accaparer une des modes cinématographique des années 80, le film de drague/arnaque. Ce mouvement très populaire auprès du public avait été initié par Chasing Girls, fer de lance de la toute jeune Cinema City. De son côté, Wong Jing avait à peine entamé sa carrière de metteur en scène avec à son actif Challenge Of The Gamesters et Winner Takes All, premières pierres apportées à l'édification du film de jeu. Roublard et opportuniste, Wong ne pouvait manquer l'occasion de récupérer le phénomène à lui surtout que celui-ci s'inscrit parfaitement dans le style fourre tout que l'homme affectionne. On ne s'étonnera pas qu'une bonne partie des formules mises en place dans Hong Kong Playboys trouveront à s'appliquer dans certaines de ses grosses productions postérieures.

Comme le pluriel de son titre Anglais l'indique, le film de Wong Jing propose non pas un playboy mais deux playboys ! Il s'agit en l'occurrence de Alexander Fu Sheng et Patrick Tse. Deux styles très différents qui poussent à s'interroger sur la nature profonde des « dragueurs » tel que le cinéma cantonais des années 80 les a représentés. Ici, c'est Fu Sheng qui occupe le devant de la scène et il a tout du dragueur de cinéma : Jeune, fringant, à la mode et riche. Mais la drague version cinéma HK de l'époque ne veut pas dire faire preuve d'un romantisme à toute épreuve afin de conquérir le cœur de sa belle et pouvoir passer le reste de ses jours ensemble. La drague pratiquée ici tient plus lieu de l'escroquerie d'écolier, comment monter l'arnaque la plus grosse qui soit afin d'abuser la jeune victime et s'accaparer son affection. Un personnage au comportement loin d'être vertueux mais dont l'attitude gamine et les enjeux sans conséquence qui lui sont associés (il n'est jamais question de sexe ou de relations sérieuses, juste de s'amuser et les victimes ne tiennent jamais vraiment rigueur de s'être faites bernées) permettent d'obtenir l'adhésion du public le plus large qui soit. Sauf que le personnage typique du genre a ici pour rival le classieux Patrick Tse. Outre le style naturel de l'acteur et la différence d'âge avec Alexander, ce qui oppose les deux personnages, c'est que Tse tout en parvenant à charmer les femmes avec un rare talent se montre beaucoup plus attentif à leurs sentiments. Ce contraste entre ces deux rois de la drague ne joue pas en faveur du plus jeune. Le personnage de Fu Sheng, authentique premier rôle du film censé obtenir l'adhésion des spectateurs, en devient même limite antipathique... Wong Jing aurait-il atteint là les limites du capital sympathie que les films de drague possédaient ? On peut le penser. La plupart des métrages centrés sur la drague qui lui sont postérieurs éviteront d'ailleurs soigneusement de proposer une telle configuration. Nos héros dragueurs seront toujours traités comme de gentils bougres un peu gamins sans que l'on puisse avoir en face contrepoint susceptible de donner lieu à des interrogations sur la nature profonde de leurs actions plus proche de l'abus de confiance pervers que d'autres choses.

Si Wong Jing a un peu raté le coche de ce qui fait l'efficacité du film de drague, le réalisateur/producteur a manifestement cherché à ancrer son long métrage au maximum dans la période qui l'a vue naître : Les années 80. Tout y passe : La boite disco, les gadgets ultra modernes totalement has been 2 ans après leur création (la maison de Fu Sheng en est bourrée !), les skates et autres vêtements fashion ultra typés. L'ensemble est évidemment kitsch à l'excès mais, vu plus de 20 ans après, cela fonde l'identité du film et lui confère un cachet plutôt réjouissant.
Accessoirement, c'est l'occasion pour Wong d'améliorer la formule magique déjà ébauchée avec ses premiers longs métrages. Autrement dit un savant mélange des genres soutenu par un casting de haute volée et saupoudré d'une bonne dose de démagogie. Ainsi, Hong Kong Playboys alterne comédie, action, romance à l'eau de rose (certains moments avec Cherie Chung ou Valentine) et gambling. Les proportions ne sont pas encore idéales (il faudra bien un ou deux ans de plus pour trouver la formule parfaite) mais on s'en rapproche. Niveau acteurs, Wong Jing peut compter sur la présence de grosses pointures telles que Fu Sheng, Cherie Chung et Patrick Tse. Ajout capital, la présence de l'effrayant Natalis Chan, incarnant déjà l'essence de la formule Wong Jingienne par son impact comique bas de plafond. Une brochette de jolies filles et une poignée de blagues racistes complètent ce tableau idyllique d'une production Wong.

Hong Kong Playboys tient donc lieu d'œuvre prototype. Un film de divertissement à peine moyen mais qui annonce le futur d'un des producteurs/réalisateurs les plus influents de Hong Kong... pour le meilleur et pour le pire.
Palplathune
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le 24 févr. 2011

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