L'OPA agressive du phénomène Tuche sur les salles aura au moins eu un avantage pour le masqué : celui de savourer Horse Soldiers en pleine séance privée, sans être importuné par un quelconque barbare.
De quoi apprécier de manière encore plus intense, alors que les habituels dénonçaient déjà une célébration supplémentaire de l'héroïsme américain cocardier, voire même un bavoir pour néo-con en mal de récit mythologique dyslexique, formule dont l'auteur voudrait sans doute jouer au petit malin alors qu'elle n'est que tout simplement gerbante de xénophobie culturelle.
Sans surprise, le masqué se révèle donc être un néo-con, puisqu'il a eu la faiblesse d'esprit de bien apprécier le spectacle emballé par un inconnu, et avec, oh outrage, ce gros bourrin de Jerry Bruckheimer à la production.
Indécrottable, le masqué.
Allez, il faudra admettre que Horse Soldiers ne sera jamais le film de l'année. C'est pas très difficile. Mais le spectacle proposé fonctionne à plein régime. Et surtout, il n'est pas aussi manichéen que certains le prétendent, même s'il n'en évite pas pour autant certains écueils.
Oui, il y a bien cette charge finale héroïque, dont le méchant ricain blond sortira vainqueur. Mais s'en tenir à cette seule constatation serait à coup sûr regarder l'oeuvre avec des bonnes grosses oeillères. Et des boules Quies, puisque des paroles prophétiques, sortant de la gorge d'un chef de guerre afghan, dessinent, à gros traits, certes, le futur enlisement des USA dans la région, un véritable cimetière des empires.
Ce serait aussi ignorer la substance même du film et du conflit, qui ne fait parler les armes pendant une heure, mais qui en dit long sur un état major velléitaire et sur la confiance qu'il porte à ses hommes. Qui dit aussi expressément que l'Amérique a tout faux quand il délègue sa vengeance à d'autres, montant un véritable joint venture de la guerre des plus fragiles, alors qu'en 2001, l'armée U.S. est encore censée être la plus efficace, voire invincible.
Dès lors, il sera hallucinant pour le spectateur de constater, comme dans 13 Hours dans un Benghazi à feu et à sang, de voir la première puissance militaire mondiale sous-traiter et mener une guerre non pas au rabais, mais minimale, s'engageant le moins possible et en concluant des alliances précaires avec l'ennemi le moins disant en terme de menace. Dommage que le film n'insiste pas assez sur le caractère indéfini de l'ennemi que le soldat américain ne peut reconnaître à coup sûr dans le brouillard opaque des luttes tribales, tant Horse Soldiers pouvait tenir un sujet en or question tension.
Tension qu'il arrive cependant à bien faire monter, le temps de la prise d'une passe stratégique aux allures de désastre annoncé, tout comme il se montre à son aise question action, rappelant les fusillades et les décors rocailleux et désertiques du très réussi Du Sang et des Larmes, film sans doute réalisé, lui aussi, par un néo-con. Tout s'explique.
Horse Soldiers, pour ceux qui affectionnent ce cinéma guerrier, constituera la bonne surprise du mois, surprise qui fera siffler les balles au plus près de ses protagonistes, de manière assez immersive, dans une ambiance musicale par instants des plus crépusculaires, avant de s'autoriser une embardée aux allures de chevauchée western des plus anachroniques et des plus exaltantes, tant en terme d'affrontement que de dramaturgie.
Si certaines fraternités dessinées sur le champ de bataille se révèlent grossières, si Michael Shannon ne s'illustre guère dans un rôle aux allures de services minimum, Horse Soldiers proposera cependant un spectacle des plus agréables, mais un plaisir apparemment réservé aux seuls néo-cons de la trempe du masqué.
Pas grave, après tout. Tant que le plaisir est là...
Behind_the_Mask, qui espère avoir l'esprit un peu plus Large que l'Ecran.