S'il y a bien une chose à laquelle je ne m'attendais pas en allant voir Hunger Games, c'était bien la difficulté que j'aurais, au sortir de la salle, à me faire un avis. Car toutes proportions gardées et en prenant en compte son caractère d'adaptation et de film pour pré-ados, il s'est avéré à mes yeux loin de la catastrophe que je préjugeais.
Peut-être parce qu'il se permet des choix pas si évidents pour une production jeune public, comme le respect de la structure du livre, donnant lieu à une lente (mais pas à proprement parler longue) mise en place plutôt que de jeter au plus vite le spectateur dans l'arène.
Et cette première partie est à mon sens la plus réussie, parvenant à rendre une ambiance oppressante au sein du District 12, que ce soit par le traitement de la lumière et de la couleur, le décor ou les événements en eux-mêmes (à ce titre, la scène du tirage au sort, qui voit, bien avant la compassion, le soulagement se peindre sur le visage des enfants épargnés, est une de mes préférées).
Le scénario pas si mal fichu fait des coupes assez pertinentes et intègre les informations nécessaires (le pourquoi et le comment du Jeu) de manière plutôt organique. On regrettera juste que tout le contexte lié au "MockingJay" (ici trouvé par hasard, à l'inverse du livre) soit passé sous silence car cela ôte beaucoup au symbolisme de la quête de Katniss. Pour le reste on se fait une vision volontairement incomplète du monde, que ce soit le Capitole ou les Districts, mais ce qu'on nous donne suffit à se prendre au jeu.
Les préparatifs constituent un autre segment intéressant, et offre les seuls (rares) moments d'exposition des autres joueurs. Passé Rue, il faut bien reconnaitre qu'on ne saura quasi rien des 21 autres protagonistes des Hunger Games, et c'est bien dommage, tant ce choix flingue tous les enjeux narratifs à venir. Le film perd de toute façon en qualité dès lors que l'on pénètre l'arène, passée une excellente scène de départ.
A partir de là, le scénario se fait totalement inégal, et compile incohérences et ficelles grossières, deus ex machina malheureux mais aussi inventivité, originalité et parfois cruauté (la fin du personnage de Serena est particulièrement ironique). La dernière heure donne en somme dans le pur divertissement, avec ses qualités et ses défauts, son principal étant d'amoindrir l'impact de tout ce qui aura précédé.
Pourtant aucune envie de quitter la salle ne se fait sentir, car au fond, de bout en bout, l'intérêt majeur de The Hunger Games ne tient pas à son scénario. Non, ce qui porte le film, c'est sa principale protagoniste, incarné par une Jennifer Lawrence aussi excellente qu'à l'accoutumée et pour qui j'hésite à cocher la case "coup de coeur" ou à rajouter un point. Mine de rien, Katniss Everdeen est un personnage charismatique alors même qu'elle ne se veut pas éminemment sympathique. Sa force, sa détermination et son caractère bien dessiné sont un contrepoids très, très bienvenu dans une époque culturelle pour laquelle le 'role model' des jeunes filles était jusque là une insipide lycéenne héroine d'une saga particulièrement nauséabonde quant à ses propos sur la place des femmes.
Alors certes, on ne tient pas là loin s'en faut un chef-d'oeuvre. Les thèmes majeurs du film ont déjà
été bien mieux traités ailleurs (Battle Royale pour la violence absurde, The Truman Show pour les dérives du spectacle à tout prix...) la forme n'est pas une franche réussite (la caméra à l'épaule ne se justifie pas systématiquement et la censure dessert le propos) mais The Hunger Games s'avère être un bon divertissement. Ce qui fait passer bien rapidement les 140 minutes de visionnage, mais pose quelque part un vrai problème. Un film sur des jeunes gens contraints de s'entre-tuer ne devrait sans doute pas se contenter de divertir le spectateur, et l'absence de malaise une fois quittée la salle serait presque une source de malaise elle-même.
Au final je reste aussi partagée qu'au début sur un film que je n'ai pas envie de glorifier, mais certainement pas envie de descendre. D'autant plus que les oeuvres pour jeune public (voire les oeuvres tout court) mettant en scène de tels personnages féminins ne sont pas exactement légion. Katniss vaut sans doute en elle-même plus que Hunger Games, mais je dois bien admettre qu'elle me fera probablement jeter un oeil sur la suite....