Hysteria
6.2
Hysteria

Film DTV (direct-to-video) de Brad Anderson (2014)

Au royaume des fous, vaut mieux parfois être aveugle et sourd

"Nan mais tu vas voir, il a une bonne note sur Imdb !" Cette raison étrange qui pousse les gens à voir des films. Mais bon, hôpital psychiatrique, plus reconstitution historique - pas forcément minutieuse - de la fin du XVIIIe. Et surtout, Kate Beckinsale au casting, pas forcément mon actrice préférée, mais à la plastique avenante, d'autant plus depuis qu'elle a décidé que vieillir, c'était pour le commun des mortels. Et puis, en prime, on me précise dans l'oreillette que le film est adapté d'Edgar et bon, Edgar, je le connais que de loin, j'en ai jamais lu, mais ça promet un peu. Et là, soudainement, je reconnais Jim Sturgess et je sens que ça va être mauvais. Soudainement, alors que le film ne promettait qu'une fable un peu glauque, on entre littéralement dans l'horreur la plus totale, la plus insensée. Soudainement, tout n'est plus prétexte qu'à une insondable ignominie, à peine supportable. Bordel de dieu, Jim Sturgess joue dans ce putain de film !

Mes camarades sont sceptiques, ils me font remarquer qu'ils ne voient pas qui est l'acteur. Je souris, sadique, et murmure alors simple "Upside Down". Puis j'attends que cela fasse effet. Leur teint blêmit à l'entente de ce titre, leurs yeux s'écarquillent d'une horreur viscérale, qui les saisit aussi brutalement que la foudre. "Mais... il a aussi joué dans Cloud Atlas et Cloud Atlas, c'était quand même pas mal !", s'exclame l'un d'eux. "Certes, mais si tu l'as trouvé supportable, c'est uniquement parce qu'il se contente d'agoniser durant tout le film". Il fronce les sourcils, se rangeant à mon argument - l'appel de la raison. Que faire ? Le film est lancé et de toute façon, le pitch a fasciné mes camarades, nous n'allons pas interrompre le visionnage. Le pitch, c'est que les patients d'un hôpital psychiatrique un poil éloigné de toute civilisation se rebellent et prennent possession des lieux, jouant à leur tour le rôle des gens du personnel. Ha ha, vous vous dites que c'est plein de promesse. Certes, mais Jim Sturgess.
D'emblée, l'acteur parvient à faire ce qu'il sait faire le mieux : être mou. Et en prime, on lui a collé quelques kilos en trop, histoire d'augmenter sa ressemblance avec une poire à lavement. Parce que non, je n'aime pas cet acteur. A l'origine, je n'avais rien contre lui, mais Upside Down m'a fait douter, puis Cloud Atlas. Ce mec est une espèce d'éternelle guimauve, fou d'amour-machin-truc, campant des personnages d'amoureux transits digne du plus relou des imaginaires romantiques. Trop bien, je peux en reprendre une tranche ? Face à lui, Kate Beckinsale n'en mène pas large : son personnage fait des crises d'hystérie à chaque fois que quelqu'un tente de la toucher, ce qui provoque des séquences assez étranges où elle donne l'impression de jouir au moindre effleurement. Que dire aussi d'Alfred Pennyworth... pardon, Micheal Caine, qui continue de jouer ce rôle qu'il tient depuis Nolan, sans forcer ? Heureusement, Ben Kingsley, lui, est un habitué des petites productions et fait malgré tout la démonstration de son talent en campant un personnage maîtrisé - même s'il présente des lacunes d'écriture. Tant pis, l'acteur y insuffle une intensité qui rend tout de même la chose crédible.
Seulement voilà. Oh oui, voilà. Je n'ai pas lu l'oeuvre initiale, mais je m'attendais à un minimum de folie, dans tout ça. Des trucs un peu glauques, voire même une réflexion sur la folie face à la santé mentale, où l'on ne saurait plus très bien qui est sain d'esprit et qui est totalement out. Manque de chance, ce coche-là n'est pas seulement manqué, que non, il est très minutieusement évité par le film, qui laisse là toute chance de réflexion pour foncer droit sur du suspens parfaitement attendu. On échappe du coup pas à la séquence où le héros doit entrer dans les appartements du méchant pour fouiller et se retrouve bloqué par une arrivée impromptue et autre. On fait vaguement référence au fait que le fou qui dirige l'asile a des méthodes qui fonctionnent mieux que celle du véritable directeur, mais comme on souligne aussi que c'est le méchant du film, difficile de s'attacher à sa méthode. D'autant que même le personnage central est finalement plutôt mal écrit et la révélation finale à son compte aurait pu être surprenante si elle ne servait pas à une happy end baveuse.

Cinq, ça paraît cher payé, je sais, mais au final, même si Jim Sturgess fait des pieds et des mains pour être mauvais, le reste n'est pas désagréable en soi et c'est même un plaisir de retrouver Ben Kingsley dans un rôle plutôt chouette. Du coup, on passe un moment pas forcément horrible, mais qui relève plus du plaisir coupable capté à 22h30 sur M6 que du long métrage que l'on souhaiterait voir au cinéma. Aucun effort de mise en scène, peu d'idées concernant la photographie... Totalement oubliable.
0eil
5
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le 21 janv. 2015

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