En s’attachant à la relation forte entre Ida (Anna) jeune nonne qui doit prononcer ses vœux, et sa tante, véritable passionaria du libéralisme sociétal, Pawel Pawlikowski retrace les années sombres de la guerre froide en Pologne. Pays qui se cherche, engoncé dans un communisme primaire mais où le poids de la religion reste très prégnant. Cette quête d’un passé spolié, qu’entameront les deux femmes, la vertu s’appuyant au bras du vice, les mèneront à reconsidérer leur vie et sera déterminant pour leur avenir. Tout au long de ce film, on ressent l’oppression de ces années de plomb. Les prises de vue et les décors jouent sur des volumes géométriques rectilignes et autres perspectives fuyantes au point d’en écraser les protagonistes qui se retrouvent de fait presque hors du cadre. Le montage en séquençages furtifs ajoute au malaise ambiant. Quant au noir et blanc (digne d’un Robert Bresson) il contribue à l’épure souhaitée afin de ne s’attacher qu’à l’essentiel. De ces années 60, alors qu’en France nous chabadabadions, Pawlikowski exprime le mal être d’une Pologne qui vomit ses remords pour mieux rebondir. Avec ce concept très maitrisé, cet ascétisme bouleversant, ce film semble tout droit émaner de la « Nouvelle Vague » française (on pense à Resnais, Truffaut, Rivette). Mais sa contemporanéité sous-jacente le place de fait en tête de la production de cette nouvelle vague du cinéma polonais qui émerge depuis quelques années.