Noir et blanc sans saveur
Que restera-t-il après le visionnage d’Ida ? On serait tenté de dire pas grand chose, tant le film de Paweł Pawlikowski est un véritable échec dans sa démarche même. Narrant le récit d’une jeune femme élevée au couvent, celle-ci découvre son identité juive et celle de ses parents, ce qui la poussera alors à chercher leur sépulture, ceux-là ayant été tués durant la guerre. A première vue un récit classique, déjà vu de nombreuses fois, mais qui paraîtra rapidement incompréhensible tant le contexte est mal défini. Censé se dérouler en Pologne durant les années soixante, Ida ne donne aucun indice et reste mutique concernant son récit. On en vient donc rapidement à être perdu, dans cette Pologne froide et déshumanisée, théâtre d’un antisémitisme qu’on arrive difficilement à saisir. Malgré sa courte durée (1h20), Ida ennuie profondément, enfermé dans un récit des plus linéaires, au rythme mal construit. Car si la démarche de réaliser un film froid et mutique est tout à fait respectable, il en est autrement quand le réalisateur semble totalement perdre le contrôle sur son idée de départ.
Car Ida est malheureusement ce que beaucoup de réalisateurs actuels croient nécessaire de faire pour être respecté : un catalogue de la mise en scène. Ainsi Paweł Pawlikowski soigne son image, persuadé qu’une lumière parfaite – mais factice – et un noir & blanc des plus propres parviendra à faire oublier la vacuité de son récit. Mais celle-ci en devient presque risible, tant celui-ci semble plus intéressé par la manière dont il va construire chaque plan que la manière dont il va nous faire saisir la psychologie de son héroïne. C’est donc en pilotage automatique qu’avance le récit, embourbé dans cette structure longiligne de laquelle ne ressort rien. Pas même les décors – peut-être dans un plan ou deux seulement – ne sont mis à contribution. Ce sera donc trop tard, après une heure interminable que le réalisateur osera enfin, bien que maladroitement, apporter du neuf. Ida est donc un film bien trop froid, bien trop formel pour espérer marquer son spectateur, tant il semble se regarder maladroitement le nombril. Il aurait été nettement plus pertinent de proposer un récit plus évolutif, et surtout moins balisé.