"Most people know nothing about themselves."

Mon dernier visionnage d'un Lubitsch remonte à il y a plus d'un an, et "Illusions perdues" (That Uncertain Feeling originellement, quel est donc le rapport avec Balzac ?) coche à première vue pas mal de cases dans le registre typique de ses comédie sophistiquées, avec des dialogues raffinés et piquants qui fusent pendant 80 minutes dans un registre de la comédie de remariage. Le thème de la psychanalyse n'est en outre pas traité lourdement comme cela fut souvent le cas à l'époque, rétrospectivement, en faisant de cette discipline quelque chose de tout-puissant. Non ici c'est simplement un paramètre catalyseur de la prise de conscience de la femme interprétée par Merle Oberon, qui se rend compte que son hoquet à répétition est le signe d'un dysfonctionnement plus profond — elle n'est en réalité pas aussi heureuse et satisfaite que ce que les apparences de son couple laissaient supposer.


Non sans pénibilité, le trio de tête qu'elle forme avec son mari Melvyn Douglas et son nouvel amant pianiste de formation Burgess Meredith essaie d'impulser une dynamique dans les rapports amoureux qui restera malheureusement bien poussive. Les trois ne cabotinent pas vraiment mais ne parviennent jamais à servir les répliques de Lubitsch avec pétillant attendu, enfermés dans une forme de sophistication artificielle il me semble. Cet aspect vaudeville chic, dans lequel la femme se rend compte qu'elle est négligée par son mari car ce dernier est accaparé par son travail, n'évolue jamais ailleurs que dans des sphères mineures, avec quelques allusions drôles pour l'époque (des sous-entendus sexuels assez explicites, notamment jouant avec le hors champ) mais quand même très peu réjouissantes sur le thème de l'absence d'épanouissement.


Le problème du film, quand on regarde la chronologie, c'est qu'il est coincé entre "The Shop Around the Corner" et "To Be or Not to Be", deux gros morceaux considérés comme des classiques. Il y a bien sûr des moments savoureux, des séquences délicatement mises en scènes, à l'instar de l'introduction utilisant la présence d'un chien pour montrer l'indifférence d'un homme vis-à-vis de sa femme. Mais clairement cette comédie est davantage "gentiment idiote" que "intelligemment drôle", et sans sombrer dans la comédie de boulevard affligeante, fait du rase-motte peu passionnant. Lubitsch aussi a le droit de faire des films mineurs...

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le 18 mars 2024

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Morrinson

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