Le temps d’un homme, le temps d’une rédemption

La foi de l’homme est une souche virale, provoquant la haine et la violence autour de lui. Ce sentiment est fortement partagé dans les confins de l’Ouest et c’est ce que Clint Eastwood tente de démontrer dans son œuvre. L’univers des cow-boys se prête bien au thème et on prend le temps d’analyser et de mesurer la profondeur de l’âme humaine. Les valeurs ont beau se rattacher aux références de western que l’on connait, en passant par John Ford et Sergio Leone pour ne citer qu’eux, le réalisateur emprunte une problématique de nature existentielle.


Les actes ont des conséquences comme des répercussions. Le retrait est une forme de passivité que l’on accepte de bonne grâce afin de mener une vie paisible. Le tout est tenu par la seule force émotionnelle qui guide nos cœurs. Il ne faudra donc pas attendre longtemps pour se rendre compte que ce pont est aisément fragilisable, au nom de sa fierté, de son honneur ou du respect. La colère pèse alors dans les esprits qui ne cherchent que la facilité afin de s’acquitter de leur peine. Pour se faire, Eastwood incarne William Munny, fermier depuis sa retraite anticipé dans le milieu du crime et de la terreur. Il démarre avec une faiblesse que l’on verra évoluer tout au long de l’intrigue. Dépassé physiquement et mentalement, son passé le rattrape et le hante de nouveau, signe que la paix avec lui-même n’est pas encore conclue.


La lecture et l’immersion dans le récit est puissante. Il n’y a pas de peur dans l’ambiance. En revanche, la spontanéité d’une arme peut rapidement pimenter le visionnage. Ce qu’en tire le réalisateur, c’est un drame irréversible. Chaque cible atteinte entraine un cri, puis le silence. Chacun appréhende la mort comme il le souhaite, mais le constat est tel que le passé disparaît avec la personne, tout comme ce qu’il aurait pu avoir par la suite. La violence est gratuite, mais il y a un rapport de force à considérer. Le débat fait rage dans les rues des cités Américaines. On distingue ainsi des leaders qui répandant des valeurs qui ne reposent sur aucun répit. La notion de justice même est remise en cause, du fait que l’on compense la paix avec une force de violence impardonnable. Les plus coriaces subsistent que s’ils s’adonnent au vice et à la traitrise. La loyauté aura beau plaider le contre, il n’y a que le dernier qui tient le fusil qui aura le dernier mot.


Les partenaires qui accompagnent Munny ne sont que des motivateurs dans toute cette fresque de haine. A la rencontre de la gente féminine, pour qui l’on se bat, on n’y trouve que de la rigidité et de la fierté qu’elle ne peut préserver à sa manière. L’appel à la violence répond donc présent et parsème à son tour un flot d’injustices. Alors que l’on apprend qu’un ex-partenaire de crime se laisse dominer par la sagesse avant toute action, et qu’un jeunot se vantant d’une maturité par la force peine à vendre crédible, Munny est le seul a gardé ses objectifs clairs, malgré le pas en retrait qu’il maintient jusqu’à un dénouement explosif. On ne se ment pas à soi-même, ce malgré la nature des actes qui aident à réparer des torts causés. Une fois que le mal a frappé, il n’y a plus qu’à attendre la sanction qui s’imposera d’elle-même.


C’est donc avec attention que l’on réinvente la situation de l’Ouest avec un œil contemporain. « Impitoyable » ne connote pas obligatoirement une cohérence au sein des personnages, campant une figure spécifique de la société Américaine. Il prétend davantage, il prétend viser juste et toucher la cible que sont les spectateurs, leur signalant que la violente bête qui guide nos instincts primaires est toujours présente. On ne s’en sépare jamais et Eastwood en prend conscience, dans un dernier acte qui évoque tout ce qui s’est préparé auparavant. Si l’on s’attache à ce personnage au passé qui rime avec massacre et gratuité, c’est notamment pour le mystère qui plane sur son destin, intimement lié à notre jugement à son égard.

Cinememories
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le 11 janv. 2018

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