Un portrait de femme, celui de Katja qui après avoir perdu son fils et son mari dans un attentat à Hambourg, décidera et difficilement, de se venger.
Diane Kruger offre une performance abrupte de cette femme dévastée. Comment survivre à un tel drame. Entre haine et abandon, toutes ses émotions saisies par une caméra au plus près, ses longs moments d’absence, ses réflexions inabouties, d’allers-retours et d’immobilité, dans une situation ingérable pour nous signifier l’après, sont intenses et inquiétantes.
Ambiance dépressive et joutes verbales, pour un procés brossant une justice engluée dans ses protocoles laissant la porte ouverte à la vengeance potentielle, qui trace subtilement le malaise à se retrouver face à ses bourreaux.
Un final qui reste étonnant par le choix et par la simplicité de mise en œuvre, sans concession, certes convenu, mais perçu comme dérangeant. Un acte violent et isolé, acte qui sera d’ailleurs on l’imagine, vite oublié, sans que la justice ne puisse y puiser matière à réflexion, transférant certainement la responsabilité entière à Katja, le rabaissant à un seul acte sans nuance.
Final peu apprécié parait-il.
Il s’inscrit pourtant dans le genre vengeance dont nous avons régulièrement droit en sorties cinéma.
Alors est-ce peut-être le fait que le réalisateur se serve des attentats commis par le NSU entre 2000/2006 qui nous ferait regarder ce film non comme divertissement mais comme un constat qui se devrait d’être plus réflexif ? D’interroger la justice ou la suite des événements, de ce que cet acte pourrait impliquer de politique par exemple ? De nous décrire les terroristes et leur adoration à Hitler ? de nous interroger sur l’existence aujourd’hui de tels gropuscules ?
Mais on le sait déjà, ces actes se répètent inlassablement dans l’indignation de certains mais aussi dans la plus grande indifférence et interrogent ici, sur les décisions extrêmes que l’on pourrait prendre si nous y étions confrontés. On peut alors regretter cette absence réflexive, notamment sur le contexte sociétal. Car la caractérisation de la famille par exemple, pointe le laisser-faire par l'égoïsme et les incompréhensions multiples, et confortera l’abîme de la solitude dans lequel Katja plonge inexorablement.
Ainsi, le dysfonctionnement de la police qui de prime abord pensera à un règlement de comptes entre dealers, pour le racisme ordinaire…
On suivra donc et seulement, le cheminement de Katja et celui-ci est particulièrement réussi. Aucune démonstration excessive dans son personnage. Aucune glorification de ses actes. Il est bien trop hasardeux de se permettre un jugement.
Une femme blanche et allemande pour lutter contre un groupuscule nazi, le cinéaste ne fait pourtant pas dans la provocation. C’est bien plus fin qu’il n’y paraît, en nous impliquant dans son propos de bien meilleure façon que si il avait choisi une actrice étrangère, qui aurait de fait, confortée la distance.
Fatih Akin opte par ce que l’on attend pas. Glaciale et sèche, la mise en scène est dense, efficace et révèle aussi de beaux instants plus calmes sur un ensemble alliant tension et émotion exacerbées. Une utilisation de sa caméra sans effet accessoire, appuie le malaise et certainement ce sentiment mitigé entre réussite et manque de finesse et de fluidité à lier les trois étapes du film. Mais son final n’est-il pas la seule réponse dramatique au constat de notre société.
Situation tristement banale, finalement.