« Les jumeaux » : tada ! C'est comme ça que commence le film qui fait l'objet du quiproquo. De mon quiproquo de courte durée, étant donné l'accent québécois vite de la partie. Globalement, il faut d'ailleurs bien avouer qu'il est plutôt insupportable dans la bouche du fils, messire Simon Marwan. Cela entache passablement la narration et entame même carrément sa compréhension à l'occasion de quelques rares lignes du script tout simplement inintelligibles. C'est dommageable, certes, mais ça n'estompe pas mon enthousiasme à l'égard d'un film que je n'attendais pas aussi bon.
En point d'orgue, le rythme est plus que bien foutu : les séquences d'action et de parlotte se succèdent sans faire d'anicroche. Le montage à base de prolepses et d'analepses est plutôt atypique mais fait montre d'un étalage thématique, pas rébarbatif pour un sou, entre des personnages et des lieux désignés par les mêmes lettres rouges sang impromptues qui barraient l'écran au tout début. Plus qu'un gadget pour cinéphile, cette répartition est clairement ce qui éloigne la propension à bayer aux corneilles devant un thriller dramatique tout ce qu'il y a de plus prévisible.
Car ce que je viens de décrire est tout ce que n'est pas Incendies. Le summum de la classe est même carrément atteint à la toute fin du film, quand ce qu'on attendait comme une annonce des hostilités siège enfin sur son trône en me barrant le visage d'une expression béate. Alors, monsieur, dois-je comprendre que le film serait monté à l'envers ? Oui et non. Oui car tout le récit des péripéties de la mère défunte est enchâssé dans une scène se déroulant « ici et maintenant ». Non, car Incendies fait preuve d'une cohérence et d'une astuce sans nom en retombant sur ses pattes (et pas de derrière, siouplait !).
Dans les sujets qu'il aborde, le film de Villeneuve est de prime abord cosmopolite mais aussi particulièrement vicieux. Cette perversité, on la trouve tout d'abord dans le travail réalisé sur l'image. A la fois belle et sale, elle est le reflet d'un pays déchiré en deux nations entre la Palestine et Israël. En partant de là, la qualité d'image se fait incendière, et « sublime » les atrocités commises et montrées sans pudeur pour subjuguer de réalisme. Après les grands mots, on peut principalement retenir que ce film a des qualités de mise en scène peu communes dans le genre, que son scénario fait preuve d'originalité, mais que malgré tout il n'est pas exempt de quelques longueurs qui font pas mal tirer sur la vue pour parvenir à rester éveillé... Conclusion : tout, tout, tout ; en tout et pour tout, je ne me répéterai jamais assez : Incendies m'a ravi.