Le film étant disponible sur le site internet d'Arte jusqu'au 13 septembre 2024, je me suis dit que j'allais en profiter pour le voir. Il faut dire que j'avais vraiment bien aimé Réalité, je ne m'étais pas frotté aux autres productions de Quentin Dupieux, qui sortent ces derniers temps à raison de deux fois par an.
Le plus frustrant c'est qu'on peut difficilement expliquer l'idée de départ sans casser ce qui fait son intérêt. Moi et ma compagne on ne savait rien du pitch et cela a fait parti du charme : le film fait exprès de trainer les pieds avant d'expliquer en quoi il se passe un truc "incroyable mais vrai" et une fois qu'on l'apprend on est assez étonné tant l'idée est incongrue. Idem pour le repas entre ami où ça parle de tout et de rien et où le personnage de Benoit Magimel met 15 plombes à révéler ce qui lui arrive. Et lorsqu'elle arrive, la révélation m'a littéralement fait hurler de rire tant ça arrive comme un cheveux sur la soupe et j'ai ricané comme un collégien pendant toute la séquence.
L'autre jour sur reddit, je lisais le témoignage d'un type qui avait passé une soirée bizarre avec des inconnus et il lachait "on se serait cru dans un film de Quentin Dupieux." Et c'est vrai que ce qui est intéressant dans son cinéma c'est que le surréalisme traverse le quotidien sans explosion : devant un fait qui dépasse totalement les lois de la physique, le couple Alain Chabat/Lea Drucker fait "c'est bizarre quand même." Ça rappelle les rêves où le soleil peut se pointer alors qu'il est 3 heures du matin sans que ça n'étonne personne.
Au niveau de la filmographie on est sur du très très petit budget et ça se sent. Il y a très peu de personnages, la majeure partie du film se passe soit dans une maison, soit dans un bureau et une scène d'opération a été filmé dans un local avec une table, deux tentures et trois figurants japonais. Mais le fait de faire du fantastique à l'économie, c'est assez ingénieux, d'autant plus que le fantastique ne se joue que sur du montage de scène (et sur le remplacement d'une actrice par une autre à un moment du film.)
Pour le casting, Alain Chabat joue son ordinaire rôle de type ordinaire et bien trop gentil pour le monde qui l'entoure. Marie Drucker, que je n'avais pas reconnue est assez intéressante en épouse à la recherche de la jeunesse. Mais surtout j'ai mis du temps à reconnaitre Benoit Magimel dans le rôle du patron beauf d'Alain Chabat qui coche toute les cases de la masculinité toxique (son intrigue est limite une métaphore de celle-ci en plus d'être le miroir de l'autre intrigue du film.)
Du reste, que vaut le film ? Et bah, si j'étais super emballé au début, j'ai quand même des réserves sur la fin. J'étais assez étonné de la durée inhabituelle du long-métrage : 66 minutes. Et j'ai hélas l'impression d'un film dont la dernière demi-heure a été speedrunné.
En effet, une grande partie des dix dernières minutes sont un enchainement d'événement sur de la musique. Était-ce parce que Dupieux avait peur d'ennuyer ? Était-ce par manque de budget pour tourner des scènes liantes ? Était-ce parce qu'il avait envie d'expédier la fin de son film et passer au suivant (Fumer fait tousser.) On a l'impression que ces scènes avaient été tournée à l'origine pour figurer telle quelle dans le film mais qu'elles ont été baignée dans de la musique pour accélérer le tempo.
Du coup, ça donne un film un peu frustrant mais qui fini de manière logique avec un chouette hommage à un chien Andalou. Ce qui confirme ce que je disais dans ma critique de celui-ci : on peut s'amuser à reprendre les scènes du film et à y ajouter un contexte qui les expliqueraient.
Mais ça en fait le film parfait pour rentrer dans le cinéma de Quentin Dupieux : on reste dans la trajectoire d'une comédie classique, le film est compréhensible et ça ne comporte pas d'éléments trop perturbant (a moins que vous ne soyez phobique des insecte, dans ce cas, c'est pas de pot.)