Inferno
5.1
Inferno

Film de Ron Howard (2016)

Le sujet est des plus classiques, mais il pouvait donner lieu à quelque chose de sympathique, avec l'illusion du terrorisme utopiste qu'il charrie, de cette purge pour le bien de l'humanité. Et Ron Howard à la barre pouvait rassurer, si l'on se souvenait de son formidable Rush et son très bon Au Coeur de l'Océan.


Hélas, c'est un peu vite oublier que le bonhomme, c'est aussi le Da Vinci Code, avec sa révélation la plus nullissime de tous les temps, et un Anges et Démons qui lorgnait vers le nanar triple A agréable. De là à penser que Ron Howard perd tous ses moyens devant une adaptation d'un bouquin de Dan Brown, il n'y a qu'un pas... Sentiment que Inferno confirme malheureusement.


Les capacités du réalisateur ne sont pas à remettre en cause, même si son art, ici, est un brin paresseux et fonctionnel, purement illustratif de la trame qu'on lui donne à animer. Mais c'est ici que le bas blesse cruellement. Car Inferno prend prétexte de la baisse de forme de son personnage principal bien connu pour faire avaler une intrigue aux vagues saveurs de poursuite et totalement cousue de fil blanc. Au point que le pauvre Robert Langdon, trahi, se voit ravalé, pendant la quasi totalité du film, en simple guide touristique de luxe, ou en véritable VRP de la culture italienne, au choix. Les plans façon cartes postales des différentes villes traversées renforcent cette impression déjà tenace, tandis que notre expert se débat plus avec sa mémoire qui flanche qu'avec les deux malheureuses énigmes qu'ont lui met sous le nez. Et il est à ce point diminué que son sidekick, la toujours ravissante Felicity Jones, se fade le plus gros du travail. Le comble, au vu de ses capacités étalées dans les deux films précédents...


Si ce n'était que cela. Car Inferno s'avère, cerise sur le gâteau, totalement incohérent et what the fuck dans l'agencement des éléments de son scénario, assénés de manière totalement arbitraire dans une chronologie des faits qui laisse pantois. Si cette impression de grand n'importe quoi pouvait paraître fun dans Anges et Démons, ici, elle commence par faire lever les yeux du spectateur au ciel, avant que celui-ci ne s'agace profondément, puis d'abandonner l'affaire en cours de route, tellement Inferno se présente comme une lamentable fête à neuneu laxiste et totalement je-m'en-foutiste. Même si Ron Howard, derrière la caméra, fait en sorte qu'aucun temps mort ne vienne parasiter son film, le spectateur qui n'en croit pas ses yeux ne pourra que compter le nombre de coïncidences heureuses, de facilités et de portes miraculeusement ouvertes qui le parsèment. Il apprendra aussi que les musées italiens,ce sont des vrais moulins et que l'on peut piquer une oeuvre d'art incognito sans même déclencher une alarme...


Il en sera de même avec certaines réactions du pauvre Langdon, qui ne se pose même pas la question de savoir pourquoi quelqu'un qu'il ne connaît ni d'Eve ni d'Adam lui colle aux basques. Ou quand il informe par exemple en toute connaissance de cause son poursuivant, qui ne lui veut donc pas du bien, de sa prochaine destination. Ou encore de son expression de surprise alors qu'il se trouve sous terre, et que le retournement de situation auquel il fait face est évident depuis sa première vision de cauchemar... Ces dernières, qui auraient pu être prétextes à quelques jolies images de fin du monde artistiques, ne seront que brèves et pasteurisées, noyées en outre dans un numérique maladroit qui navigue dans les couleurs utilisées entre l'orange passé et le jaune pisse. Quel dommage...


D'autant plus que l'aventure ne lambine pas en route et emprunte pour son climax un lieu atypique et très cinégénique, même si Inferno trouve encore le moyen de le torpiller dans un gag aux accents très Tex Avery, ou quand il y fait entrer des special ops... Pour les faire observer le combat final dans un suspense ultra artificiel. Il peut aussi se targuer de faire évoluer la très jolie Felicity Jones, un des uniques rayons de soleil du film, faisant vivre de sa beauté le seul personnage (un petit peu) travaillé du film, même si celui-ci , dans son évolution, se voit venir de loin. Oui, je suis faible. Oui, le masqué a un petit coeur mou de caramel quand il la voit à l'écran, certes. Mais il lui reste assez de sang dans le cerveau, aussi, pour se rappeler que l'amnésie n'est pas une excuse pour se foutre de la gueule du monde et du spectateur qui a payé sa place. Certains auraient dû s'en souvenir avant d'écrire avec les pieds pareil scénario, se payant même le luxe de filer à ce pauvre Robert Langdon, qui n'en demandait certainement pas tant, une ancienne love story fadasse et qui n'apporte strictement rien au récit. Car si cela n'avait pas été David Koepp, j'aurais été à deux doigts de lui dire, à ce scénariste, d'aller brûler en enfer, tiens. Ca lui aurait fait les pieds.


Behind_the_Mask, Felicity... Aussi.

Behind_the_Mask
3
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Une année au cinéma : 2016

Créée

le 11 nov. 2016

Critique lue 3.4K fois

46 j'aime

8 commentaires

Behind_the_Mask

Écrit par

Critique lue 3.4K fois

46
8

D'autres avis sur Inferno

Inferno
Behind_the_Mask
3

The Purge

Le sujet est des plus classiques, mais il pouvait donner lieu à quelque chose de sympathique, avec l'illusion du terrorisme utopiste qu'il charrie, de cette purge pour le bien de l'humanité. Et Ron...

le 11 nov. 2016

46 j'aime

8

Inferno
pierrick_D_
5

Critique de Inferno par pierrick_D_

Robert Langdon,éminent professeur de symbologie à Harvard,se réveille sur un lit d'hôpital à Florence sans savoir ce qu'il fout là.La jolie doctoresse qui le soigne,Sienna Brooks,l'informe qu'il a...

le 31 mai 2022

13 j'aime

9

Inferno
Wolvy128
4

Critique de Inferno par Wolvy128

Qu’on se le dise tout de suite, si Inferno fait forcément mieux que Da Vinci Code, particulièrement désastreux, il n’atteint toutefois jamais le niveau de Anges et Démons, nettement plus séduisant,...

le 20 oct. 2016

13 j'aime

2

Du même critique

Avengers: Infinity War
Behind_the_Mask
10

On s'était dit rendez vous dans dix ans...

Le succès tient à peu de choses, parfois. C'était il y a dix ans. Un réalisateur et un acteur charismatique, dont les traits ont servi de support dans les pages Marvel en version Ultimates. Un éclat...

le 25 avr. 2018

205 j'aime

54

Star Wars - Les Derniers Jedi
Behind_the_Mask
7

Mauvaise foi nocturne

˗ Dis Luke ! ˗ ... ˗ Hé ! Luke... ˗ ... ˗ Dis Luke, c'est quoi la Force ? ˗ TA GUEULE ! Laisse-moi tranquille ! ˗ Mais... Mais... Luke, je suis ton padawan ? ˗ Pfff... La Force. Vous commencez à tous...

le 13 déc. 2017

193 j'aime

39

Logan
Behind_the_Mask
8

Le vieil homme et l'enfant

Le corps ne suit plus. Il est haletant, en souffrance, cassé. Il reste parfois assommé, fourbu, sous les coups de ses adversaires. Chaque geste lui coûte et semble de plus en plus lourd. Ses plaies,...

le 2 mars 2017

186 j'aime

25