Juste quelques remarques en vrac...
D'abord, il faut préciser qu'Inferno, contrairement à Suspiria, n'est pas un film de sorcière, même s'il en reprend quelques éléments. On aurait pu s'attendre à ce que tel soit le cœur du sujet, à ce qu'Inferno se propose comme suite de Suspiria.
Cependant, Inferno reprend de nombreux motifs rencontrés dans Suspiria. Le personnage au coeur de l'intrigue du film de 1977 était une étudiante en danse, alors qu'ici, l' «impétrant» est un homme, mais étudiant en musicologie. Je ne sais pas si Argento souhaite offrir un fil conducteur entre les deux films ou s'il a une autre raison.
D'autres éléments renvoient nettement à Suspiria, c'est le cas des yeux de chat, de la scène du taxi sous la pluie, des chuchotements, de l'érudit qui connaît l'histoire mais n'y croit pas.
On va bien croiser quelques éléments sorcellaires, toutefois. Comme dans Suspiria, on retrouve l'idée des Trois mères, qui est certainement une inspiration du de Quincy et d'autre part, le chiffre 3 se retrouve à toutes les sauces dans les histoires de sorcières. Quant à Argento, il fait dire à l'un de ses personnages que cela renvoit à un système symbolique très primordial, héritier des trois Parques...
Le chat, présent ici partout, à la solde de l'entité maléfique, est un attribut très classique de la sorcière.
Enfin, l'une des victimes, une amie du personnage principal, s'écorche le doigt à la porte du taxi avant de rentrer dans un lieu maléfique. Se piquer au doigt est sans doute à percevoir ici comme un mauvais présage et peut-être comme une référence au rouet de la mauvaise sorcière de la Belle au bois dormant. C'est d'ailleurs à ce moment que le cauchemar, l'entrée dans un monde alternatif (merveilleux, dit le réalisateur), commence.
Le dernier élément principal me faisant penser à une histoire de sorcière est l'odeur douceâtre remarquée par plusieurs personnages, qui entoure la maison de la sorcière. Il est répondu qu'il s'agit de l'odeur dégagée par une biscuiterie. Qui ne pensera pas à la méchante sorcière d'Hentzel et Gretel ?
Mais s'il ne s'agit pas d'un film de sorcière, de quoi s'agit-il ? La thématique principale semble être l'alchimie. La salle garnie de chaudrons bouillonnants en-dessous de la bibliothèque de philosophie est tenue par un homme et non une femme, ce que l'on comprend à sa voix. Les chaudrons représentent l'antre de l'alchimiste et non celle de la sorcière. La bibliothèque de philosophie en était d'ailleurs une première indication : la sorcière n'a que faire de ce genre de connaissance, elle n'est pas une érudite.
Il y a un alchimiste (Varelli) dans le film, qui est l'architecte de la maison, et il y a une sorcière (présume-t-on). Mais ni l'un ni l'autre ne sont le personnage principal, puisque c'est la maison qui occupe ce rôle et qui est peut-être encore plus remarquable que la demeure romaine de Suspiria. Elle semble proposer une sorte de parcours initiatique symbolique, qui commence par la scène de la pièce submergée dans l'eau et finira par la rencontre de la mort (l'identité réelle de la sorcière, selon elle-même), maîtresse de toutes les peurs (la plus cruelle, selon Argento).
Voilà pour les bribes d'interprétation, chacun lira dans ce film ce qu'il voudra. Notons pour terminer qu'avec cet opus, la trilogie est au fond complète (voyez Terza Madre si vous le souhaitez, mais c'est un navet), puisque la troisième mère intervient en se montrant à plusieurs reprises au personnage principal : une très belle jeune femme blonde au regard charbonneux tenant dans ses bras un énorme chat persan blanc.
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