Inherent Vice par cloneweb
Remarqué pour avoir confié des patins à roulettes à Heather Graham dans Boogie Nights en 1997, Paul Thomas Anderson continue à faire ce qu’il aime au cinéma de là à passer plusieurs années sur la production d’un film. Après The Master, remarqué pour être sorti sur pellicule 70 mm, le réalisateur revient cette année avec Inherent Vice d’après le bouquin réputé inadaptable de Thomas Pynchon publié en 2009.
Le film raconte l’histoire de « Doc » incarné par Joaquin Phoenix, détective privé dans le Los Angeles de 1970. Un jour il reçoit la visite d’une ex (Katherine Waterston, magnifique) qui a besoin de ses services. Elle a appris que son nouvel amant, un riche magnat de l’immobilier, va être interné par sa femme dans le but qu’elle récupère de l’argent. Doc va donc se lancer dans sa petite enquête
Sur le papier, le pitch a l’air d’être bien simple. Ajoutez y une bonne grosse dose de drogue, présente absolument partout dans l’histoire, que ça soit dans le nez des protagonistes ou dans les coffres de leurs voitures pour comprendre qu’Inherent Vice n’a rien d’un polar comme les autres. Joaquin Phoenix, absolument démentiel dans le rôle, incarne un privé n’hésitant pas à prendre de la poudre, à moitié hippie avec une barbe à la Wolverine et surtout complétement paumé dans un univers où tout le monde semble avoir sniffé un rail. De fait, le bougre passe son temps à être à coté de la plaque, de là à avoir des actions qui ne mèneront finalement à rien.
Habitué des mises en scène soignées, Paul Thomas Anderson ne déroge pas à ses habitudes. Inherent Vice est un très beau film. Les années 70 y sont reconstituées avec le plus grand soin, dans des décors parfaits et avec une très belle photo. Le metteur en scène enchaine les très longues séquences dont il a le secret, tout en dirigeant d’excellents comédiens dont le bien trop rare Martin Short en slip ! Ajoutez à cela une excellente bande-originale très seventies dont, excusez du peu, deux titres de Neil Young et vous ne bouderez pas votre plaisir.
Tout ça aurait pu être très bon (et on se demande ce qu’aurait donné une histoire pareille -avec son potentiel à la Casino- dans les mains d’un Martin Scorsese) mais Paul Thomas Anderson oublie un peu trop facilement le spectateur sur le bas coté de sa route. Avec son récit à tiroirs porté par une voix off sortir de nulle part, on se prend d’abord au jeu pour s’y perdre totalement. Vouloir raconter une histoire complexe, c’est bien. Laisser suffisamment d’indices et de clefs pour mieux comprendre le récit, c’est encore mieux. C’est une certitude : à un point ou à un autre de l’histoire, vous serez paumé dans la multitude de personnages, les récurrences et l’incompréhension du personnage de Phoenix à tel point que vous pourriez vous demander vous-même si vous n’êtes pas sous l’influence d’un quelconque produit illicite. De là à penser que l’utilisation de chansons pas encore sorties en 1970 (Harvest de Neil Young ne sera enregistrée qu’en 1971 et découverte par le public en 72) n’est là que pour nous embrouiller d’avantage, il n’y a qu’un pas.
Que reste-t-il d’Inherent Vice à la fin ? Un film à ambiance, techniquement parfait, porté par des comédiens inspirés. Mais une histoire bien trop alambiquée pour comprendre finalement où Paul Thomas Anderson voulait en venir. Dommage.