Nos vies, si chères
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le 22 nov. 2013
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Regarder Into the wild c'est participer à une épopée humaine extraordinaire.
Christopher McCandless, étudiant américain tout juste diplômé, décide du jour au lendemain de tout plaquer pour partir à l'aventure dans la nature américaine.
La première chose qui m'a frappé chez ce jeune homme c'est sa générosité et son absence de matérialisme. Ses parents sont manifestement extrêmement fortunés, essaient même de lui offrir une voiture plus luxueuse que la sienne (qu'il refuse avec véhémence), sans succès, et avant de partir, décide de donner toutes ses économies à une œuvre de charité. On pourrait croire qu'un jeune homme qui n'a jamais connu le besoin de toute sa jeune vie pourrait ne pas connaître la valeur de l'argent et partir sur un coup de tête par pure rébellion car en conflit avec ses parents, mais non, il ne s'agit pas de ça. "Chris" est un jeune homme qui refuse les attentes de la sociétés actuelles qu'on lui impose (réussir ses études, avoir une carrière et se marier), ces choses lui importent peu, probablement à cause de l'exemple offert par ses parents (mariés pour les mauvaises raisons, violents l'un envers l'autre, superficiels, et j'en passe).
Il décide ainsi de laisser cette vie derrière lui, sans regrets, donnant ses économies, brûlant le peu d'argent qu'il lui reste, abandonnant sa voiture, ainsi que son identité (il s'identifiera comme "Alexander Supertramp"). C'est d'ailleurs p-e le seul vrai aspect égoïste dans sa décision, car il n'indique pas à ses parents ni sa sœur (qu'il adore) ce qu'il compte faire, il les laisse dans l'ignorance et l'inquiétude.
Ainsi notre ami Chris va commencer son voyage, traversant différents états (Virginie, Arizona, Californie, Colorado etc), faisant des rencontres plus pittoresques les unes que les autres (le couple de hippies Jan et Rainey, Wayne, Tracy, Ron..), et surtout savourant des paysages naturels plus superbes les uns que les autres, nous laissant par instant découvrir les merveilles que recèlent l’Amérique, et de façon plus générale, la nature.
Ça me permet d'évoquer le second élément qui m'a frappé chez Chris, son courage. Il est vrai qu'il en faut pour abandonner le "rêve américain", le confort des études payées par ses parents, une future et probable brillante carrière, pour se retrouver sans le sou "in the dirt" (dans la saleté) comme lui dit Ron. Il en faut également pour entreprendre une telle aventure, parce qu'il est aisé, sur son canapé, d'envier Chris, de voir furtivement les paysages magnifiques qu'il peut contempler tous les jours, ou les rencontres émouvantes qu'il peut faire. Toutefois, se retrouver du jour au lendemain, SDF, à faire du stop, dormir au milieu de nulle part tous les soirs, devoir se trouver à manger par ses propres moyens ds la nature etc... Il n'a pas vécu ainsi pendant les 2 années de son périple, puisqu'il a travaillé à pls reprises (notamment pour pouvoir aller en Alaska), mais ça demande une vraie force mentale et une vraie détermination d'accomplir ce qu'il a accompli, et en ce sens, je ne peux que l'admirer. On peut tout de même penser que par moments ça frise l'inconscience, comme lors de sa descente illégale du fleuve sans casque.
En regardant ce film, j'ai éprouvé un véritable sentiment de liberté au travers de cette aventure, je pense que de nombreuses personnes ont eu ce genre d'envies, ce fantasme de retour aux sources, sans avoir le courage de vraiment le faire (puis ce n'est pas pour tout le monde). Mais c'est ce que j'aime aussi à propos de cette histoire, le retour brutal et cruel à la réalité. Après 2 ans d'aventures, de bons moments, mais aussi de plus difficiles, Chris décide de rentrer chez lui mais se retrouve littéralement piégé par la nature. C'est d'abord le fleuve et la pluie qui l'empêchent d'entreprendre le chemin du retour, puis la mauvaise interprétation d'un guide botanique, qui le poussera à ingurgiter la mauvaise plante, ce qui finira par le tuer. Au final, cette nature si belle, si riche, on le sait, peut se montrer impitoyable. Cette fin tragique et émouvante fera réaliser, en outre, à Chris après ces deux années, le poids de la solitude. Il aura même cette belle phrase pour résumer sa pensée « Happiness only real when shared » (« Le bonheur n'est réel que lorsqu'il est partagé »), qu'il écrit à bout de force. Son enfance l'aura poussé à un besoin de solitude, à tout faire pour ne pas ressembler à ses parents, mais ce périple, les expériences humaines touchantes qu'il a vécues, ont finalement changé sa vision des choses. Les leçons de vie, les expériences humaines dépeintes dans ce film sont touchantes, et je le recommande vivement.
Pour finir, il faut saluer les performances très réussies du cast de ce film, E. Hirsch y est d'ailleurs vraiment excellent, mais également dans les rôles plus secondaires, avec par exemple un très émouvant Hal Holbrook.Quant à S. Penn, malgré la durée du film, je trouve qu'il a réussi à le rendre captivant du début à la fin, et à nous permettre d'apprécier aussi bien l'aspect découverte de cette histoire, que les expériences humaines qui en ont découlée. C'est une véritable réussite, y compris la bande originale, et je comprends tout à fait le nombre important de distinctions.
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Créée
le 24 juin 2015
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