Il n'a pas fallu attendre cet été dévasté pour se rendre compte qu'en matière de tatanne orientale, la scène se montre pour le moins famélique au cinéma, tandis que John Wick ou autres Atomic Blonde ont privatisé le rayon action. Vous souvenez-vous seulement de votre dernier délice, en cette matière, dans une salle obscure ?
Le Maître d'Armes, peut être ?
La saga des Detective Dee, dans un genre plus fantasy et totalement dingo ?
Cantonnée jusqu'ici à l'exploitation direct-to-video, la saga Ip Man s'efforce de garder brillante la flamme via la mise en scène romancée de la figure tutélaire des arts martiaux et, accessoirement, mentor du Petit Dragon.
La saga Ip Man, c'est, à chaque fois, la résistance, le stoïcisme et la force intérieure de sa figure de proue, mêlés à son histoire familiale et aux soubresauts de l'histoire. Et ce Dernier Combat ne fait pas exception en dévoilant, dès les premières minutes, la maladie qui terrassera l'homme, ainsi que les rapports difficiles entretenus avec son fils. Le tout sur fond de délocalisation dans les Etats-Unis des sixties, richement recréés et d'intolérance d'un pays qui n'a fait que virer ses natifs pour s'installer sur leurs terres.
Le film est parfois maladroit, voire un brin simpliste, tandis que la version française n'aide pas à l'apprécier à sa juste valeur. Mais Ip Man 4 : Le Dernier Combat propose de parler de ce melting pot brisé, de ce sentiment violent de prédation d'une culture asiatique dans un pays ayant pourtant fait de l'accueil et de l'intégration sa réputation. Tout en exploitant, pourtant, ce que peut représenter un personnage comme Bruce Lee et l'art qu'il enseigne et promeut...
Une exclusion dont souffrira par ailleurs Ip Man de la part des membres exilés de sa propre communauté...
Et tandis que des relations père/enfant parallèles donnent une petite touche d'émotion à l'ensemble, la délocalisation en terre américaine semble avoir quelque peu assagi les combats. Il ne faudra ainsi pas attendre du Dernier Combat une invention folle ou une originalité vaine, mais l'action déployée ne se montre pas inintéressante pour autant : au contraire. Mise en scène toujours aussi lisible et propre, impact des coups qui font clairement ressentir tant la force que la douleur, sécheresse de certaines empoignades qui étonne, et, sur tout cela, règne en maître un Donnie Yen toujours aussi tranquillement charismatique, depuis 2008 et un premier épisode étincelant.
La présence de Bruce Lee à l'écran permet, enfin, la satisfaction d'un désir de fan de le voir s'inscrire, et mettre la main à la patte dans un affrontement bien classe et très différent du style de son maître, dans une saga portant haut et de manière humble ses ambitions d'action et de spectacle. Des ambitions réjouissantes dans l'aspect "à l'ancienne" que porte constamment un film que l'on aurait tort de dédaigner.
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