IRRÉPROCHABLE – 14/20
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A première vue, IRREPROCHABLE a tout du film social. Constance, démaquillée dans son jogging bariolé, présente tous les attributs de la chômeuse sympathique car sincère, admirable car résiliente, des films du genre. Sauf que Sébastien Marnier (dont c’est le premier film) est écrivain et maîtrise donc parfaitement les procédés dramaturgiques. Suivant le principe du « fusil de Tchekhov », il parsème son récit d’indices (que le spectateur ne perçoit pas comme tels) qui font dériver son récit vers l’étrange. Autrement dit, bercé par l’illusion d’un film social bien connu et codifié, le public ne voit pas venir le retournement qui s’opère au cours du récit et constitue toute l’identité du film.
La protagoniste est l’exemple parfait de ce jeu de dupes. De par son nom-même, Constance, qui n’annonce en rien son caractère obsessionnel et brutale. De par ses cheveux décolorés, aussi, dont les racines noires poussent au fur et à mesure qu’elle perd le contrôle de son petit jeu sans conséquence. On commence par la trouver sympa, elle qui refuse de se laisser abattre devant l’imprévu. Les petites taquineries qu’elle fait subir à Audrey (couper son réveil, saboter son scooter) sont, tout comme les rudes entraînements physiques qu’elle s’impose, des manières de garder la tête haute et de résister. Curieuses, certes, mais non dénuées de panache. Jamais nous n’irions si loin pour récupérer un job que l’on estime mériter.
Tout le jeu de l’identification ou non au personnage repose sur cette question de limite. Petit à petit, ce qui semblait habituel intrigue, ce qui faisait sourire finit par faire froid dans le dos. Le récit suit un crescendo qui transforme le taquin en pervers, le sourire charmeur en rictus malveillant. Parce qu’elle n’a absolument rien à perdre, Constance abat le mur des apparences qu’elle avait bâti pour renouer avec son ex-boulot, son ex-patron et son ex-tout court. La voilà donc qui ment, qui menace… On n’en dira pas plus pour laisser à chacun le plaisir de se laisser manipuler par le scénario.
Malgré toute son intelligence, celui-ci n’aurait pu déployer sa force sans l’interprétation admirable de ses acteurs, Marina Foïs en tête. Coutumière des rôles comiques par lesquels elle s’est fait connaître, elle est ici tour à tour drôle et inquiétante, charmeuse et moche. Véritablement irréprochable.
Créée
le 1 mars 2017
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