Le mouvement Dogme95 de Vinterberg et Von Trier a fait long feu. Italian for beginners est le dernier film qui s’en réclame qui ne soit pas méconnu ; il a même bien marché, au prix que la réalisatrice a essuyé les critiques de Von Trier parce qu’elle a tenu à faire une romance. Et elle a eu raison.
On reconnaît bien Festen. Le film est minimaliste, dur et crasseux, la caméra au poing se faisant le rude véhicule de vérités antiartistiques. Quand la mort prend une grande place dans l’histoire, on atteint les limites du supportable, mais Scherfig arrive à capter la vérité qui, indirectement, tient Dogme95 à cœur : son histoire ramasse tout ce qui lui tombe sous la main d’ennuyeux, de médiocre, de morbide et d’impolitesse pour en faire ressortir le liant qui constitue presque toutes les frontières du film.
On finira par avoir l’impression non pas d’évoluer dans une bulle de réel dans le réel (astuce presque inévitable du genre dont Festen s’était défait en utilisant un décor privé) mais carrément que le monde entier ne pourrait pas exister sans les personnages, comme s’ils avaient leur place dans ce qui n’est pas montré, même si parfois le cadre est si dépouillé qu’on a l’impression que l’équipe s’est filmée elle-même.
C’est donc un film Dogme95 réussi et aussi plaisant que le genre le permet, surtout que si Von Trier l’a critiqué, c’est parce qu’il se permet une remontée des enfers sous la forme d’un voyage en Italie qui cristallise intelligemment les cours de langues dont il est question dans le titre. C’est déviant, et peut-être que ça signe la mort du ”vœu de chasteté” de Von Trier et Vinterberg, mais des principes si austères auraient difficilement pu connaître plus belle mort.
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